Nicolas Sarkozy vient d'annoncer la privatisation de la SNECMA pour renflouer les caisses de l'état. Si je ne puis que me réjouir du retour au privé d'une telle entreprise, je suis dubitatif quant au principe de gestion consistant à vendre des actifs pour combler des déficits nés de l'excès des dépenses courantes.
N. Sarkozy a en outre annoncé que la constitution en catimini de "noyaux durs" d'investisseurs institutionnels serait limitée, et que l'essentiel des actions seraient vendues au grand public pour renforcer l'actionnariat populaire. Là encore, l'idée parait aller dans le bon sens, et on peut se féliciter que le non-énarque Sarkozy n'ait pas envie de reconstituer des conseils d'administrations de "groupes potes de l'inspection des finances", pratique dont Ghislaine Ottenheimer vient de magistralement démontrer les effets pervers.
Qu'il me soit toutefois permis de suggérer immodestement au ministre un mode de privatisation beaucoup plus sain des entreprises encore nationalisées: que chaque adulte français résidant en France reçoive sans bourse délier le même paquet actions de l'entité privatisée (par exemple dix actions par français adulte, soit environ 400 millions de titres à émettre au total représentant la totalité du capital mis en circulation), et qu'il soit libre de les conserver, de les revendre, ou d'augmenter son portefeuille, le titre étant bien sûr de facto coté en bourse.
Après tout, les entreprises publiques ont été nationalisées avec l'argent du contribuable, elles ont souvent dû être renflouées avec l'argent du contribuable, celui-ci paiera encore longtemps sous forme d'impôts ou de dette publique les dettes du Crédit Lyonnais, des Charbonnages de France, la recapitalisation de France Télécom, et quelques autres ardoises. Par conséquent, il serait juste que le patrimoine constitué avec sa sueur soit rendu au peuple français, qui ainsi pourrait espérer être remboursé au moins partiellement de la ponction qu'il a subie pour que l'état achète ces entreprises puis répare les multiples erreurs de gestion commises, sans parler des nombreux vols purs et simples dont la révélation régulière lui a donné la nausée.
En vendant ces actions plutôt qu'en les donnant, l'état obligera les futurs propriétaires à les payer en fait une deuxième fois, et néglige le fait que la propriété de l'état devrait bel et bien être celle du peuple français. Autrement dit, il taxerait à 100% le produit de la vente de ce patrimoine.
On me répondra que de cette façon, l'état ne ferait pas rentrer d'argent dans ses caisses. Mais l'argument est spécieux. le seul moyen de réduire nos dettes et nos déficits est de réduire drastiquement nos dépenses publiques. Il ne sert à rien de compter sur une recette exceptionnelle, qui ne se produit qu'une fois, pour refermer une voie d'eau, si les causes structurelles de ces déficits à répétition ne sont pas traitées. Aussi donner les entreprises nationalisées aux français au lieu de les leur vendre serait non seulement pure justice, mais encore cela placerait le gouvernement, quel qu'il soit, au pied du mur et l'obligerait à s'attaquer enfin à nos déficits publics à la racine du mal. Et le formidable accroissement du patrimoine privé qui s'ensuivrait serait un formidable "inducteur de croissance" à moyen terme.
On me répondra aussi que le manque de leadership dans l'actionnariat ainsi créé poserait un problème pour ces entreprises, et que des actionnaires qui n'ont pas payé leur bien à leur juste valeur sont en général de moins bons surveillants de la direction générale que des invesstisseurs soucieux du rendement d'un investissement qui leur a coûté. Cette objection est aisément contournable. Dès qu'elles seraient côtées, ces actions feraient l'objet d'achats massifs par des investisseurs sérieux qui se dépêcheraient de créer les conditions du succès de leur investissement.
En outre, il est possible de combiner une privatisation "1/4 de noyau dur (en veillant à sa constitution) et 3/4 aux français", ce qui permettrait à la fois de rassurer les marchés quant au sérieux de l'actionnariat, tout en rendant aux français l'essentiel de ce qui leur a été pris. Je préfère de loin la variante "don intégral", mais s'il faut faire cette concession pour garantir le sucès de l'opération, alors pourquoi pas.
Ne rêvons pas, un tel geste du gouvernement n'est pas prêt de se produire, tant nos politiciens considèrent la france comme "leur" chose et non comme la nôtre. Pourtant, dans des circonstances autrement plus délicates, c'est ce qui est envisagé pour privatiser le pétrole Irakien: donner une part égale du capital à tous les foyers du pays, et laisser les irakiens bénéficier eux mêmes du fruit de l'exploitation de l'or noir, sous la forme de leur choix (vente ou dividende). Pourquoi ne pas envisager la même forme de privatisation des actifs publics en France ?
Allons monsieur Sarkozy, vous tenez là enfin une vraie réforme, innovante, socialement équitable, facteur de croissance, qui ne pourra que renforcer votre popularité et celle de votre camp politique: rendre le patrimoine de la France aux Français. Alors, chiche ?
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