Si un politicien vous affirmait qu'il était possible, en France, en une seule année, faire passer le taux d'impôt sur les sociétés de 33 à 17%, de remplacer l'impôt sur le revenu actuel (tranche maxi 40%) par une flat-tax de 19%, et de supprimer simultanément l'ISF, la taxe professionnelle, la taxe d'habitation, les taxes foncières et les droits de mutation sur les ventes immobilières, sans remettre en cause les grands équilibres budgétaires de la nation, vous le prendriez sûrement pour un fou ! Et pourtant, cela n'a vraiment rien d'utopique ni extravagant. Voici comment.
Chez les politiciens, les économistes, dans les médias et le grand
public, la croyance est répandue selon laquelle il serait impossible de
réduire massivement nos taux marginaux d’imposition, que ce soit sur le
travail ou le capital. Nos déficits, le poids de notre administration,
notre "modèle" social... seraient autant de freins de nature à empêcher toute évolution radicale de notre fiscalité. Sauf à vouloir
jeter dans les rues des milliers de fonctionnaires et d'allocataires,
nous ne pourrions soi disant pas envisager de révolution fiscale.
"Ce serait le chaos, la grève générale, mai 68 en
pire"
Cette argumentation ultra-conservatrice heurte le bon sens de tout
observateur des réalités étrangères : les exemples de pays qui
ont réussi à sortir d’impasses économiques bien plus graves que celle
que nous connaissons, en appuyant leur résurrection sur une réforme
fiscale majeure, sont légion (cf. ces exemples).
Nous pouvons même aller plus loin et noter
qu’aucun n’a réussi son redressement sans de sévères réformes
fiscales : réduction du poids de l’état dans l’économie,
réduction drastique de l’imposition marginale des producteurs de valeur
ajoutée, et des taux marginaux des taxes désincitatives au
travail ou à l’investissement.
Il faut donc tordre le cou à l’idée selon laquelle nous pourrions
sortir de notre spirale déclinante actuelle sans autre chose que des
réformettes fiscales conçues comme de simples ajustements paramétriques
du code des impôts (CGI) actuel.
Voyons comment il serait possible de rendre la France fiscalement très
attractive sans pour autant créer une situation chaotique, loin s'en
faut.
Impôts sur les résultats d'exploitation des sociétés
Le taux d’impôts sur les sociétés (IS) est aujourd’hui de
33,33% (sauf exceptions dont le CGI est friand). Son produit fiscal est
d’environ 53 Milliards d’Euros (2005).
Ce taux est purement artificiel. L’imposition réelle des résultats d'exploitation des
sociétés est bien plus élevée.
La plupart des pays considèrent que l'assiette taxable de l'impôt sur les sociétés est constituée de la valeur ajoutée nette créée moins la
masse salariale moins les dotations aux amortissements moins les frais
financiers moins d’éventuelles provisions pour risques opérationnels.
En clair, un peu partout, assiette taxable de l’IS # VA ( M.salariale + Amorts +
%emprunts + provs)
Or, en France, cette assiette fiscale fait l’objet d’une première
ponction non négligeable, la Taxe professionnelle, qui rapporte aux
collectivités locales 24 Milliards d’Euros (source).
La Taxe professionnelle, bien que calculée sur une base différente de
l’assiette qui sert à la payer, agit bel et bien comme un surcroît de
taxation de l'excédent d'exploitation. Simplement, la TP est payée aussi par les entreprises qui perdent de l’argent (et nombre d’entreprises perdent de l’argent
à
cause de leur TP).
Par conséquent, le prélèvement opéré par l’état sur la base normale de
l’imposition des bénéfices est de 77 milliards et non de 53, soit une
imposition réelle de plus de 42%...
Or, les entreprises reçoivent de l’état, à des titres divers, 65
milliards d’aides, selon
un récent rapport remis au gouvernement, toutes plus
inefficaces les unes que les autres. Certes, ce rapport
additionne allègrement des choux et des carottes, avec une définition
particulièrement extensive de l'aide aux entreprises : certaines aides
sont des subventions directes en numéraires, d’autres sont des
exemptions ou réductions d’impôts consentis pour tel ou tel secteur,
d’autre enfin sont constitués d’allègements de charges sociales
compensés par l’état (# 24 milliards dont 17 pour les allègements
"Fillon" sur les bas salaires, le reste étant constitué de dispositifs
d'allègement antérieurs).
Les réductions d’impôts et allègements de charges sont effectivement
des aides, en ce sens qu’elles sont assumées par d’autres
contribuables. Aussi, "supprimer ces aides" revient à obliger les
entreprises à supporter d’autres charges en contrepartie, alors que
supprimer des subventions directes ne fait que réduire des recettes
"d’opportunité".
L’étude de la structure de ces 65 milliards d’aides montre qu’environ
50 milliards peuvent être supprimés sans difficulté autre que politique
(42 Milliards pour l'état, 8 milliards pour les CL). Le reste
(essentiellement des allègements de TVA ou allègements fiscaux sur les
clients des entreprises) serait malheureusement impacté sur le
consommateur final en cas de suppression, nous ne l'étudierons donc pas ici.
Toujours est il que l’échange suivant : 50 milliards d’aides
aux entreprises en moins, 50 milliards d’impôts sur les sociétés en
moins, serait totalement neutres pour les budgets publics pris
globalement. En contrepartie, la répartition entre état et
collectivités du produit fiscal serait remise en question. Nous y
reviendrons.
Prenons pour hypothèse le maintien des déficits publics à leur niveau
actuel, d’une part, et une absence de réaction économique de la
croissance aux réformes, ce qui est hautement improbable, mais qui
constitue de loin le cas le plus défavorable à ma proposition.
Autrement dit, regardons le résultat de la réforme sur les bases
taxables telles qu’elles étaient en 2005.
Pour maintenir le déficit constant sans croissance de l’assiette
taxable, l’état devrait faire rentrer 27 milliards au lieu de 77. Il
pourrait donc supprimer la taxe professionnelle, que tout le monde
condamne mais que personne ne réforme jamais, et appliquer un taux
d’impôts sur les sociétés d’environ 16,2 % (sur une base augmentée d'un
tiers du montant de la TP, en supposant que les entreprises réduisent
leurs marges par ailleurs), arrondi à 17% pour simplifier.
En contrepartie, les allègements de taxes sur les bas salaires seraient
supprimés, ce qui obligerait les entreprises à supporter 24 milliards
de charges supplémentaires sur leur masse salariale. Leur économie ne
serait donc "que" de 26 milliards, mais en contrepartie, les effets de
seuil qui les poussent à maintenir leurs salariés en dessous de 1,6
SMIC disparaitraient, ce qui serait à terme très bénéfique pour
l’espoir d’ascension sociale des salariés.
De surcroît, il est absolument certain qu’un taux d’IS à 17%
entrainerait un vaste mouvement de relocalisation comptable de
bénéfices en France (sauf réaction rapide de nos compétiteurs), ainsi
que des ré-implantations d’actifs productifs. Enfin, à terme,
l’investissement, stimulé par une moindre ponction sur le capital
employable, créerait de nouvelles richesses. Ces phénomènes ont été
largement observés dans tous les pays qui ont baissé leur taux
d’imposition « corporate ». Il est donc probable que
cet IS à 17% rapporterait, dès la première année de sa mise
en ouvre, et plus encore à la seconde, bien plus que les 25 milliards
prévus : sous réserve que les institutions publiques
n’augmentent pas d’autres dépenses, ce serait tout... bénéfice en vue de la
réduction du déficit public.
Le problème des entreprises employeuses de main d’oeuvre à bas salaire
Le deal proposé peut se résumer ainsi : abandon de Taxe professionnelle (+24 G) contre réintégration des allègements de charges sur bas salaires (-24G), et en prime taux d'IS divisé par 2 (+25 G).
Ceci dit, un tel échange entre TP et charges soulèvera inévitablement une objection à laquelle il faut répondre: depuis que la masse salariale a disparu du calcul de la taxe professionnelle (en 2003), celle-ci est essentiellement assise sur la valeur des immobilisations corporelles (i.e. : les investissements) des entreprises. Une substitution entre taxe professionnelle et charge sur des bas salaires risque surtout d’avantager des entreprises employant des salariés à haut revenu (qui paieront beaucoup moins de TP et réintègreront peu de charges auparavant allégées) et pénalisera les forts employeurs de main d’uvre peu qualifiée, qui généralement investissent moins et donc paient moins de TP, mais paieront à nouveau des charges "plein pot". Si ces entreprises sont peu rentables, et donc ne bénéficieront que peu de la baisse de l’IS, elles risquent de connaître des difficultés.
Il existe plusieurs moyens de traiter le problème, dont le développement serait fastidieux. En résumé, l’échelonnement sur plusieurs années peut être étudié, ou la réintégration provisoire dans les comptes des entreprises concernées des dégrèvements de TP versés par l’état aux intercommunalités. Compliqué ? Certes, mais l’actuel dispositif ne l’est pas moins. A terme, le nouveau dispositif fiscal sera neutre par rapport à la façon dont l’entreprise affecte ses ressources, et ne sera plus défavorable aux entreprises qui tentent d’élever leur spectre de qualification et de salaires vers le haut.
Ceci dit, et quand bien même la question serait jugée scandaleuse - "Sans coeur !" - par certains, faut il compenser les déséquilibres de la réforme ? Elle provoquerait sans doute à court terme des faillites d’entreprises fragiles employeuses de bas salaires. Une plus grande flexibilité du travail (les 35 heures...) pourrait en sauver certaines, mais ne nous voilons pas la face, des dépôts de bilan sont inévitables. Ceci dit, réforme ou pas, la concurrence de pays à très bas salaires place de toute façon sur ces entreprises des épées de Damoclès de plus en plus lourdes, et la politique actuelle d’allègement de charges ne pourra indéfiniment se poursuivre pour leur venir en aide. Seule une réforme drastique de nos conceptions en matière de protection sociale, hors du champ de cet article, changerait un peu la donne.
En contrepartie, la réforme fiscale proposée créerait un cadre économique bien plus favorable au maintien en France et à la réimplantation d’un plus grand nombre d’emplois qualifiés. Et comme l’a montré en son temps Jacques Rueff, la richesse créée par ces emplois serait pervasive et initierait à nouveau la création d’emplois moins qualifiés, mais dans des cadres de travail améliorés, au sein d'entreprises qui auraient moins d'intérêt à maintenir artificiellement 60% des rémunérations en dessous d’1,6 SMIC, et donc rechercheraient l’évolution par le haut de leurs compétences, savoir-faire, productivité, et donc rémunérations afférentes. La contrainte pesant sur les salariés peu qualifiés, pour pénible qu'elle apparaisse, ne serait que temporaire.
Une telle réforme montrerait que la France ferait à nouveau le choix de la recherche de l’excellence, et non celui de la défense de postes de travail voués à la paupérisation. Nous ne pourrons de toute façon pas lutter contre les pays à bas salaire sur le terrain des entreprises à forte intensité de main d’uvre, et c'est heureux, car nous devons proposer aux salariés d'autres perspectives. Autant accepter cette évidence et faire un choix d’avenir, même s’il risque d’être douloureux pour certains à court terme.
Impôts sur les individus, locaux et nationaux
Aujourd’hui, 64 milliards d’euros de ressources des collectivités locales proviennent de transferts de taxes en fait prélevées par l’état. Là encore, environ 50 milliards pourraient ne plus être transférés sans autre désagrément que comptable, à charge pour les collectivités de se financer par elles mêmes. (nb. Cette estimation conservatrice évite de compter deux fois les dégrèvements de taxe professionnelle assumés in fine par l'état).
Or, l’impôt sur le revenu rapporte à l’état environ 56,4 Milliards. Il pourrait donc être tout bonnement supprimé sous sa forme actuelle, moyennant 6 milliards d’économies diverses. De la culture
subventionnée aux associations d’intérêt douteux, à l’éducation et ses effectifs non enseignants pléthoriques, en passant par les centaines de comités Théodule sans intérêt, et la baisse du coût de perception des impôts simplifiés, les 6 milliards doivent pouvoir aisément se trouver.
Ceci dit, si on supprime 50 milliards de transferts vers les collectivités, ainsi que 24 milliards de taxes professionnelle, il faudra bien que celles-ci trouvent à se financer.
En outre, l’occasion d’une telle réforme « big bang » serait trop belle pour enfin se débarrasser de la taxe d’habitation (TH), pour 13 milliards d’euros, dont le mode de calcul a le double inconvénient d’être d’une complexité absolument effroyable, et d’aboutir à une imposition dégressive, c'est-à-dire qu’un habitant de classe moyenne d’une commune pauvre paiera plus qu’un habitant riche d’une commune riche, en proportion de ses revenus.
Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Les taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties (TF, environ 18G à elles deux) ont les mêmes inconvénients que la TH. Enfin, les droits de mutation (DM) sur les transactions immobilières, qui rapportent 6 Mds aux communes, grèvent le budget des accédants à la propriété et altèrent la mobilité des lieux de résidence par rapport à l’évolution des lieux de travail : Leur suppression serait également souhaitable.
Il conviendra donc de remplacer la somme (Transferts + TP + TH+ TF + DM) par une autre source de financement d'un montant équivalent, soit 111 Mds.
Où l’on reparle de la Flat Tax
Mes lecteurs des premiers jours (il en vivrait encore, du côté de la Patagonie) savent que l’impôt sur le revenu actuel, en 2002, ne rapportait que 7.6% des revenus déclarés. Vérification faite, la proportion n’a quasiment pas évolué en 2005. Par conséquent, en supposant conservativement que l’économie ne réagisse pas à un tel stimulus, un impôt unique sur tous les revenus de 7.6% vierge de toute « niche fiscale » rapporterait autant, soit 56 Milliards, que la construction actuelle.
Si l’on souhaite continuer à exempter les très bas revenus du paiement de l’impôt, ce qui serait politiquement vendeur, le taux nécessaire serait de l’ordre de 9.5%.
Par conséquent, un impôt local de 19% avec une exonération forfaitaire des premiers euros de revenus correspondant à peu près au seuil de pauvreté rapporterait sans difficulté les 111 Milliards nécessaires aux collectivités locales pour boucler leurs fins de mois. Là encore, il est probable que la réaction de l’économie à une telle révolution fiscale serait étourdissante, provoquant un surcroît de rentrées fiscales inimaginable par nos technocrates et leurs conseillers néo keynesiens. Les surplus pourraient être reversés à l’état en vue d’amputer puis très rapidement d’annuler nos déficits.
On peut aussi imaginer que l'état adopte ce principe mais qu'il "étrangle" autoritairement les collectivités de 1% la première année, afin de les forcer à faire des économies. Il n'y a pas de raison que les collectivités ne recherchent pas elles non plus à faire l'audit de leurs dépenses mal conçues...
Certes, le big bang fiscal ainsi conçu rebattrait les cartes : certaines collectivités risqueraient de voir leurs revenus chuter, d’autres constateraient une augmentation considérable. Idem pour les conseils généraux et les régions. Sans doute un fonds provisoire de péréquation, alimenté par une petite fraction de notre nouvelle Flat Tax, et destiné à éviter des mises en cessation de paiement de certaines localités, serait nécessaire. Mais à moyen terme, l’effet sur les collectivités locales serait salutaire.
En effet, celles-ci ne peuvent aujourd’hui tout simplement pas envisager de financer leur développement sans quémander des subventions à l’échelon supérieur. Le coût de la nécessité de monter à chaque projet des tours de table de plus en plus complexes est élevé : temps nécessaire, bureaucraties afférentes, et remise en cause des projets dès qu’un partenaire est défaillant. Sous réserve de retravailler les attributions des différents échelons de collectivités locales (ce qui mènera inévitablement à des suppressions, hors du champ de cet article), celles-ci bénéficieraient d’une plus grande autonomie fiscale, et leurs contribuables profiteraient d’une fiscalité bien plus lisible qu’actuellement.
En gros, ne subsisteraient comme impôts locaux que notre flat tax locale et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (que les communes pourraient transformer en paiement à l'usage, au poids, etc...), ainsi que quelques impositions plus marginales comme la TLE (taxe locale d’équipement, destinée à couvrir le coût de raccordement des nouvelles constructions aux réseaux existants). Dans ces conditions, l'impôt étant lisible et le décideur proche, les contribuables sauraient aller faire pression sur leur maire ou leur conseiller général pour que la pression fiscale reste raisonnable.
Il serait donc envisageable de fixer le taux à 19% la première année, puis de laisser chaque collectivité libre de fixer son taux ultérieurement, sur une assiette imposable calculée de façon identique au niveau national. Ainsi, la compétition fiscale engendrée devrait garantir une plus grande responsabilisation des élus face à l’augmentation des impôts, voire même provoquer un mouvement de baisse, initié par quelques communes meilleures gestionnaires que d’autres.
Impôts sur la fortune et droits de succession
Un rapport parlementaire (Marini) a montré que le manque à gagner du fisc liés à l’exil fiscal de gros contribuables était sans aucun doute bien plus élevé que les 4 milliards d’apport de cet impôt au budget : sa suppression se financerait rapidement d’elle-même, d’une part parce qu’une partie des capitaux exilés se relocaliseraient en France après de telles réformes, d’autre part parce que les nouveaux entrepreneurs enrichis ne seraient plus incités
à l'expatriation.
Enfin, il est probable que les installations étrangères de sièges sociaux en France augmenteraient à nouveau rapidement : autant de corporate Tax et d’impôts de nouveaux résidents qui entreraient au budget de l’état, des assurances sociales et des collectivités. Dans ces conditions, moyennant une gestion vertueuse du côté « dépenses » de leurs budgets, les entités publiques retrouveraient très vite l’équilibre financier, et des réformes comme celles des retraites ou de l’assurance maladie, qui demanderont plus de préparation et des transformations structurelles majeures, pourraient être envisagées très sereinement.
Quant aux droits de succession, qui rapportaient 8 milliards environ avant les prochaines mesures Sarkozy, non chiffrées, leur simplification (pourquoi surtaxer les héritages en ligne indirecte ?), une diminution du taux (pourquoi pas une « flat death tax » à 19% ?) puis leur suppression pure et simple pourrait être également très rapidement envisagée, sans crainte de creuser les déficits publics, ce qui serait un élément majeur de stabilisation des capitaux les plus volatiles sur le territoire français.
Conclusion
La proposition de réforme tracée ci-dessus à grands traits ne prétend pas être parfaite. D'autres combinaisons d'impôts et de taux sont possibles, l'affectation des produits fiscaux entre état et collectivités peut être débattue. De plus, elle manque d'ambition par rapport aux problématiques de baisse globale des dépenses publiques (in fine indispensables), puisqu'elle ne propose en l'état que 32 G€ de baisses réelles de dépenses, soit moins de 2% du PIB. Il est évident qu'une réflexion plus aboutie sur le périmètre des missions de l'état et des collectivités permettrait d'aller plus loin.
D'un strict point de vue comptable, la réforme ci dessus n'évite pas quelques approximations qui nécessiteraient un approfondissement avec l'aide d'experts ès fiscalité ayant accès aux données plus détaillées dont Bercy dispose. Entre autres:
- les effets de certaines déductions sur les différentes assiettes taxables devraient être simulés (notamment en ce qui concerne la TVA). Gageons que Bercy possède toutes les données et la puissance de calcul pour modéliser tout cela.
- De plus, une réforme - par ailleurs absolument nécessaire - des assurances sociales allant vers leur privatisation et la mise en place du "salaire complet" modifierait les taux calculés à la louche par simple application d’une règle de trois. La proposition ne prend pas en compte la problématique de la réforme de la CSG ou des retraites. En revanche, en réintégrant les allègements "Fillon" dans les bas salaire, elle rétablit une certaine vérité sur le prix de la protection sociale monopolistique, facilitant sa réforme ultérieure.
- Les hypothèses que j’ai retenues en matière de réponse de l'économie à la réforme sont très conservatrices, gageons que les taux de 17 à 19% retenus pour la démonstration pourraient rapidement être abaissés pour accroître la part du produit du travail et du talent des français qui resterait dans leur poche.
- L'assiette de l'IS devrait sans doute être retravaillée pour être élargie, ce qui diminuerait encore le taux d'IS applicable.
- Je n'ai pas tenu compte de la nécessité - prouvée par plusieurs expériences étrangères - de supprimer la double taxation des revenus du capital (au niveau "corporate" puis des individus), mais l'impôt sur le revenu des capitaux mobiliers est aujourd'hui assez négligeable, l'approximation ne changera pas les ordres de grandeur de la proposition.
- A terme, seul un contrôle strict de l’évolution des dépenses, la volonté de supprimer toutes les interventions injustifiées de l’état et les organismes publics redondants, ainsi que la privatisation de certaines dépenses sociales, pourront réduire encore plus significativement la pression fiscale totale, seule méthode pour envisager une croissance à la fois forte et durable
Mais malgré les limitations de l’exercice, le calcul qui précède montre qu’il est possible de réformer radicalement la structure de la fiscalité du pays pour en faire un territoire très compétitif, quasiment un paradis fiscal, et ce sans risquer la cessation de paiement des entités publiques. Par analogie avec de nombreux exemples étrangers, il est plus que certain qu'une telle réforme provoquerait un surcroît de croissance "endogène" (c'est à dire non exclusivement dépendante d'une captation résiduelle de la performance du reste du monde) de plusieurs points, et ce chaque année (cf. exemple de l'Islande,de l'Irlande, de l'Estonie)
Quant à ceux qui argueraient d’un manque de "justice" de telles réformes, ils devront expliquer en quoi remplacer un impôt progressif et des impôts régressifs dont les plus pauvres sont partiellement exemptés, par un impôt proportionnel unique, dont tous les contribuables sous le seuil de pauvreté pourraient être exemptés, serait antisocial, surtout si, comme les exemples étrangers le suggèrent, le chômage venait à être réduit drastiquement et les freins salariaux à l’ascension sociale levés.
Nous devons impérativement revoir notre fiscalité dans le sens de plus d’efficacité, foin des dogmes de la fiscalité punitive promus depuis trop longtemps par notre classe politique. Et la bonne nouvelle, c’est que nous le pouvons !
Annexe : tableau avant / après Des idées pour une vraie rupture
Pour finir, une petite citation de Mart Laar, ancien premier ministre d'Estonie, parlant des critiques de la Flat Tax avant qu'il ne la promulgue: "Il nous disaient que c'était impossible, tout comme marcher sur l'eau. Nous ne savions pas que c'était impossible, alors nous avons marché sur l'eau".
On prête également à Winston Churchill une version simplifiée: "Nous ne savions pas que c'était impossible, alors nous l'avons fait".
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