L'offensive médiatique des néo-libéraux bat son plein. Manuel Valls, Bertrand Delanoë, Dominique Strauss Kahn, après Jean-Marie Bockel et Martin Hirsch, et même quelques timides allusions de Ségolène Royal... Ca commence à faire beaucoup de socialistes qui avouent des inclinations libérales. Libérales altérées, sans doute, mais libérales tout de même. La blogosphère ne parle plus que de cela. Comment donc ? "Les socialistes modernes sont les seuls et uniques vrais libéraux" ! "La gauche doit se réapproprier les valeurs libérales, dont ils sont les vrais porteurs", nous disent ils. Les socialistes purs et durs fulminent.
Je devrais sauter de joie, moi qui ai écrit il y a cinq ans, à l'ouverture de ce blog, que le libéralisme redeviendrait fréquentable, pour ne pas dire furieusement fashion, trendy, chébran, kiffable, lorsque des leaders du PS pourraient tenter une incursion vers le social-libéralisme sans être automatiquement exclus de leur fédération, excommuniés par l'archévêque Mélenchon, le Pape Hugo et le Prophète Karl.
Sans aller jusque là, je ne boude certes pas mon plaisir. Essayons d'imaginer la scène: Bertrand, militant socialiste, devenu maire d'une grande ville, se lève, et chaque matin, quand il se rase, il se dit:
"j'ai passé toute ma carrière au PS, pour m'apercevoir qu'au fond, le socialisme version Mitterrand, ça ne marche pas. L'état entrepreneur ? ça ne marche pas. Les services publics ? Ca marche mal. La pauvreté ? Nous l'avons développée. La dépense publique ? Elle nous emmène dans le mur . Les vélibs ? Pour que ça marche, il faut en confier la gestion à JC Decaux. Aznar, Thatcher ? Ni Tony Blair, ni J.L. Zapatero n'ont remis en cause les fondamentaux de leur bilan..."
De fil en aiguille, Bertrand, qui doit toute sa carrière politique à une allégeance quasi mécanique aux dogmes du parti, en vient à penser, parce qu'il lui reste un peu de capacité d'observation des pays qui nous entourent, que, sapristi, le libéralisme donne partout de bien meilleurs résultats que l'état providence, y compris en termes de réduction de la pauvreté, de réduction des inégalités, et de progression du niveau de vie, qui sont les principaux objectifs revendiqués de tout socialiste qui se respecte.
Alors, parce qu'il lui reste une once de lucidité, Bertrand va faire un truc fou: il va dire aux socialistes, que le libéralisme n'est pas une sorte de résurgence malsaine du satanisme, que la gauche soit non seulement s'accommoder, mais se ré-approprier le libéralisme, au risque que certains crient au sacrilège.
Certes, Bertrand ne peut se permettre de passer pour un traître aux yeux de ses compagnons de fédération. Et quarante années de conditionnement à l'eau de rose ne s'oublient pas comme ça. Alors Bertrand biaise, Bertrand tempère. "Certes, je reconnais les vertus du libéralisme, mais on ne peut pas laisser l'économie fonctionner selon les principes du laissez-faire", "il faut humaniser le marché"... Ce qui fait doucement pouffer le libéral authentique, celui qui a rendu sa carte de DL quand Madelin a intégré l'UMP, qui a traîné ses fonds de guêtres chez Liberté Chérie ou Alternative Libérale, et bientôt au PLD, (Parti Libéral Démocrate) créé il y a trois semaines --- et n'ayant pas encore de site web ---. Bertrand, si tu veux une formation de perfectionnement libéral, je suis disponible, et pas cher.
Mais l'essentiel est là: Bertrand, et quelques autres, ont osé faire leur coming out. En substance : "Ne rejetons pas le libéralisme". Reste à savoir si, sous la pression de l'aile gauche de leur parti, ils assumeront jusqu'au bout cette évolution.
Pendant une large part de leur vie militante, Bertrand, Manuel, Dominique et les autres ont confondu "socialisme des moyens" et "socialisme des résultats". En admettant qu'ils aient eu un idéal --- Malgré mon a priori très fort sur l'absence de conviction profonde des professionnels de la politique, pourquoi pas ? ---, ils ont longtemps cru que "le service public", "l'état garant de l'intérêt général", "la taxation juste des plus riches", et autres leviers habituels de tout gouvernement social-dirigiste qui se respecte, étaient le seul MOYEN de développer la prospérité tout en élevant le niveau de vie des plus modestes, un RESULTAT hautement désirable.
Résultat que les sociétés atteignent d'autant plus qu'elles sont libérales (voir cette série d'ancienne notes). Pouvoir d'achat ? Emploi ? Mobilité sociale ? les sociétés ont d'autant mieux réussi qu'elles ont mis en place un système libéral, fondé sur la liberté individuelle régulée par l'obligation d'assumer ses responsabilités.
Nos néo-libéraux du PS ne vont pas au bout de leur démarche, comme un Johan Norberg, ancien militant anarchiste, que sa réflexion personnelle a poussé à épouser le libéralisme sans compromis, parce qu'il s'est rendu compte que la société libérale fournissait les meilleurs MOYENS de parvenir à la FINALITE de prospérité, d'égalité et de justice qu'il avait initialement recherchée en adhérant à un mouvement très marqué à gauche. Sans oublier cet ancien militant syndicaliste qui tient un blog libéral depuis 5 ans...
Prisonniers de leur passé, les camarades Bertrand et Manuel n'osent pas voir, ou du moins n'osent pas affirmer, que les problèmes qui affligent encore et toujours nos sociétés ne sont pas issus d'un prétendu excès de libéralisme, mais d'une trop grande présence des états dans la marche du monde:
La crise alimentaire ? Il n'existe guère de marché mondial plus distordu par les états que les marchés agricoles (à part peut-être le marché pétrolier, évidemment, autre "marché" à problèmes). La crise du logement ? Ce sont 100 années de logement encadré, administré, bridé et subventionné par l'état qui ont installé ce secteur dans un état de crise quasi permanente. La crise du subprime aux USA ? Ce sont des lois empêchant le marché du crédit de fonctionner suivant les plus élémentaires principes prudentiels qui l'ont initiée, avec un bon coup de main de politiques foncières violant les droits de propriété, qui ont artificiellement poussé les prix à la hausse, engendrant une spirale spéculative malsaine. L'éducation en chute libre ? Il n'est pas de secteur plus étatisé que celui là, et les pays qui adoptent une gestion libérale de l'enseignement obtiennent de meilleurs résultats.
Et ceux qui réclament plus de libertés pour le commerce agricole mondial, ou plus de liberté pour le logement, sont ils les jouets des lobbys de l'argent, vendus aux intérêts financiers qui règnent sur l'économie mondiale ? Non, de simples citoyens qui veulent d'abord que les plus pauvres aient les meilleures chances de ne pas le rester. Et qui défendent avec plus ou moins de talent, et souvent de faibles moyens, leurs convictions.
Parce que nous avons choisi depuis longtemps de soutenir le système institutionnel et les politiques que nous jugeons de loin les plus capables d'améliorer le sort non seulement des plus démunis, mais de toute la population, nous, les libéraux sommes les vrais agents du progrès social sur l'échiquier politique. Les libéraux ne sont pas des social-étatistes, mais des "socialistes par finalité".
C'est d'ailleurs ce rôle qu'ils ont largement joué au XIXème siècle. Bastiat réclamait la liberté syndicale au nom de la liberté des individus de former des associations syndicales pour défendre leurs intérêts, pourvu qu'elles fussent non violentes et respectent la vie et la propriété d'autrui. Après sa mort précoce, Emile Ollivier convaincra Napoléon III de légaliser la grève pacifique. Waldeck-Rousseau donnera aux syndicats le droit d'exister. Autant de droits sociaux qui furent promus par des libéraux, au nom de la liberté individuelle, souvent contre la gauche traditionaliste de l'époque.
Sans vouloir vous vexer, MM. Valls, Delanoë & co, je suis beaucoup plus social-finaliste, à défaut d'être social-étatiste, que vous n'êtes libéraux. Mais votre cas n'est pas désespéré. Au plaisir suivre les progrès de votre conversion.
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Au fait, quel est l'ultra-libéral qui a dit: "de plus en plus d'intérêts se diversifient, se mêlent, s'enchevêtrent... Par dessus les frontières des douanes et des races, travaillent les grandes coopérations du capitalisme industriel et financier (...) Il se fait ainsi un commencement de solidarité capitaliste, redoutable quand elle est manipulée par des intérêts inférieurs, mais qui, sous l'inspiration de la volonté commune des peuples, peut devenir à certaines heures une garantie pour la paix..."
Le même suppôt des multinationales ajouta peu après: " Le capitalisme même, en ce qu'il a de plus sain, fécond, universel, a intérêt à apaiser et à prévenir les conflits".
Adam Smith ? Ricardo ? Bastiat ? Reagan ? Non, non... Jean Jaurès, en 1911 et 1914. Belle évolution pour quelqu'un qui déclarait, en 1895, que "Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage". Ceux qui, au PS, jettent la pierre à Delanoë et Valls devraient se souvenir du parcours intellectuel de leur icône.
Allez, comme aux grosses têtes, encore une autre. Quel politicien français a dit: "Tandis que la règle du capitalisme américain est de permettre aux nouvelles entreprises de voir le jour, il semble que celle du capitalisme français soit de permettre aux vieilles entreprises de ne pas mourir. Mais le capitalisme français ne peut obtenir ce résultat contre nature sans une intervention active de l'état. C'est ce qui doit changer".
On dirait du Milton Friedman. Antoine Pinay ? Alain Madelin ? Aurélien Véron ? Vincent Bénard ?
Perdu. Léon Blum. Si, je vous assure.
Jaurès et Blum n'étaient certainement pas des modèles pour les libéraux, mais ils ont incarné, à leur époque et dans leur contexte, une gauche qui avait compris l'importance de la liberté d'entreprendre et de commercer pour la paix et la prospérité, notamment des classes ouvrières, et qui voulait réduire l'influence de l'état français sur ce capitalisme là, pour casser les connivences qui s'exerçaient, sous couvert de bonnes intentions, au détriment des personnes sans connexions politiques.
Voilà qui devrait conforter MM. Valls et Delanoë dans leur démarche.
Voila une avancée inattendue pour les idées que vous défendez depuis des années ! Delanoe sera-t-il excomunié, ejecté, placardisé ? A-t-il les soutiens qui permettront d'obliger les socialistes à prendre un virage à 180°? A lire les diatribes de ses camarades de parti, ses jours pourraient être comptés, mais le personnage a tellement plus d'envergure que Ségolinotte, plus de sincérité que Fabius, plus de détermination que Strauss-Kahn, et ne sera pas facile à contrer !
Une petite rectification de votre texte, Vincent. Delanoe n'utilise pas l'orthographe "laissez-faire" lors qu'il critique les politiques de droite mais "laisser faire", ce qui constitue une nuance essentielle.
Rédigé par : michel | vendredi 23 mai 2008 à 08h46
Excellent billet, vraiment!
Pour moi, mettre en avant les apports sociaux du libéralisme est de loin le meilleur moyen pour le voir se développer en France.
Et oui, le "social" se vend mieux que la liberté en France, et de nombreux libéraux ont du mal à intégrer ce fait et à en tirer la conclusion qui s'impose: il FAUT insister sur l'aspect social du libéralisme si l'on veut le "vendre".
Sinon, je ne savais pas que tu fus socialiste Vincent ;)
Enfin, Johan Norberg n'a jamais, à ma connaissance, fait partie d'ATTAC. Mais il était anarchiste durant sa jeunesse.
Rédigé par : Mateo | vendredi 23 mai 2008 à 12h34
Il faut dire que Bertrand a comme directeur de cabinet le fils de Jean-François Revel (Nicolas). Cela explique peut-être un peu cela ?
Rédigé par : Val | vendredi 23 mai 2008 à 12h41
"Tandis que la règle du capitalisme américain est de permettre aux nouvelles entreprises de voir le jour, il semble que celle du capitalisme français soit de permettre aux vieilles entreprises de ne pas mourir."
Wouaaaaaaah... Cette phrase aurait pu être écrite aujourd'hui. C'était déjà comme ça du temps de Léon Blum??? Ca fait un siècle qu'on roule avec le frein à main serré??? Il va falloir encore un siècle, alors. Ce sera sans moi, les gars.
Quant à la pseudo-conversion de Delanoë au libéralisme, elle me fait bien rigoler. A peine a-t-il lâché le l-word, le mot qui fâche, qu'il s'empresse d'affirmer: il n'est pas question de mettre le libéralisme au coeur de l'économie et de la société. Et il récuse l'appellation de "social-libéral".
Donc il est libéral, mais il est pas libéral, et il pense qu'il ne faut pas appliquer le libéralisme. C'est vraiment un concours de foutage de gueule, chez les socialistes.
On respire. Personne n'a touché au frein à main. On sera toujours pas sorti de la gare d'ici un siècle.
Rédigé par : Robert Marchenoir | vendredi 23 mai 2008 à 20h53
Au fait Vincent, est-ce fait exprès le fait que "Liberté Chérie" et "Alternative Libérale" pointent tous les deux sur le site du premier nommé? ;)
Sinon, c'est Emile Ollivier, avec deux "L".
Rédigé par : Mateo | vendredi 23 mai 2008 à 23h18
On peut s'interroger sur le libéralisme de Delanoe quand il prone le maintien d'effectifs importants de fonctionnaires, une pression fiscale forte, la poursuite d'une politique de redistribution de l'Etat providence ... Bref, son libéralisme ne va pas dans le sens de "moins d'Etat". Pourtant, son intervention a le mérite de briser un tabou, et de façon spectaculaire. Chez les socialistes, il sera intéressant de voir ceux qui oseront embrayer dans la voie qu'il préconise, et ceux qui s'y opposeront résolument. Mais sa prise de position pourra également inspirer un mouvement vers le libéralisme (et contre l'étatisme ambiant)à l'UMP. Bref, dans les deux partis, on pourrait voir se démarquer nettement les pro-libéralisme et les conservateurs. Va-t-on vers une transformation majeure du paysage politique ?
Rédigé par : michel | samedi 24 mai 2008 à 08h19
"Chez les socialistes, il sera intéressant de voir ceux qui oseront embrayer dans la voie qu'il préconise." (Michel)
Mais quelle est la voie qu'il préconise? En dehors du fait qu'il a osé prononcer un gros mot, est-ce que quelqu'un a lu un texte où Delanoë expliquait ce qu'était le libéralisme pour lui?
En revanche, il a bien expliqué ce que ce n'était pas: en gros, tout ce que veulent les libéraux.
Donc s'il s'agit de dire: je suis libéral, c'est à dire je suis pour les élections, et pour que Sarkozy les perde (parce que lui c'est un gros autoritariste qui n'est pas libéral), ça me paraît un peu short, pour qualifier Delanoë de libéral.
En revanche, pour le qualifier de clown, ça va très bien.
Rédigé par : Robert Marchenoir | samedi 24 mai 2008 à 14h11
Profession de foi du « libéral » Bertrand Delanoë :
« Je ne suis pas social-libéral.»
[On présumera qu’il se prétend « social ». Donc, comment peut-il se dire « libéral » s’il refuse l’appellation de « social-libéral » ?]
« Qu’est-ce que le libéralisme ? C’est une doctrine d’affranchissement de l’homme, née dans l’Europe des Lumières. C’est, comme son nom l’indique, une idéologie de la liberté, qui a permis l’accomplissement de grandes conquêtes politiques et sociales. Le principe en est simple : il n’y a pas d’oppression juste, il n’y a pas de chaîne qui ne doive être brisée, il n’y a pas de légitimité, ni donc de fatalité, à la servitude. »
[Rien de changé dans la pensée de gauche : c’est toujours la rebellitude pseudo-romantique. Dire non au lieu de dire oui. Parler au lieu de faire. S'opposer à tout. Passer son temps à se pignoler en rêvant de révolution. « L’accomplissement de grandes conquêtes sociales », c’est la continuation de la langue de bois cégétiste.]
« Le libéralisme, c’est dans le même temps l’idée […] qu’être libre ce n’est pas faire ce que l’on veut mais vouloir ce que l’on fait. »
[Le genre de formules creuses dépourvues de sens, mais qui sonnent bien et qu’adorent les « intellectuels » de gauche. T’es obligé de trimer toute ta vie pour donner 80% de ton salaire réel à l’hydre fonctionnariste, mais t’es pas un esclave de l’Etat, no-no-non : c’est juste une question de point de vue. Faut positiver. Il suffit de « vouloir » ta servitude, et hop ! tu deviens libre. C’est ça le libéralisme socialiste. Tu fais ce que monsieur Delanöe te dit de faire, et avec le sourire, en plus. On est chez George Orwell.]
« Chaque individu a droit au bonheur. »
[Bien sûr que non. Ca c’est le cauchemar communiste ou fasciste, celui où l’Etat est censé procurer le bonheur aux gens : droit au logement, etc. Pour un libéral, chaque individu a le droit de rechercher son bonheur. « The pursuit of happiness. » C’est très différent. Ca n’a rien à voir. L’Etat ne vous garantit nullement que vous allez y arriver. C’est à vous de vous débrouiller.]
« Le libéralisme, c’est la tolérance devant les démarches individuelles, c’est une certaine forme d’indifférence bienveillante de la collectivité devant la singularité des choix de chacun. »
[Bon, allez, dis-le : le libéralisme, c’est la tolérance de l’homosexualité. Personne ne conteste son homosexualité à Delanöe. Mais c’est un peu court comme programme politique.]
« Ce n’est pas une utopie que de concevoir la justice sociale dans le développement durable ? »
[Le concept de justice sociale est totalement étranger au libéralisme.]
« Ce n’est pas une utopie que de faire progresser la civilisation de la liberté et de faire de la France et de l’Europe un modèle de développement humain pour le monde ? »
[Toujours le crypto-colonialisme socialiste, qui a d’ailleurs pour conséquence directe la colonisation de la France par les immigrés.]
« Nous agissons pour qu’un jour nos rêves se réalisent. Les plus beaux rêves sont ceux qui se réalisent, même partiellement. »
[L’ « utopie », le « rêve »… Toujours le refus socialiste de la réalité. Rien à voir avec le libéralisme.]
« Tous les efforts financiers de l’Etat vont à d’autres, à ceux qui n’en ont pas besoin. »
[Toujours l’obsession de la redistribution. Delanoë pense que la raison d’être de l’Etat, c’est de choisir à qui il va donner le pognon. On nage dans la mélasse socialiste. On est au summum de l’anti-libéralisme.]
« La gauche a toujours été le parti des fonctionnaires, c’est-à-dire des agents de l’Etat. Elle le reste, et elle n’a pas à s’en excuser : elle peut s’opposer, avec fierté, à la démagogie d’un régime qui veut toujours moins de fonctionnaires, mais toujours plus de policiers, toujours plus d’infirmières. La Grande-Bretagne de Tony Blair a mené contre le chômage une lutte dont les plus sourcilleux de nos libéraux saluent l’efficacité, et elle a gagné cette bataille en créant 1,5 million d’emplois dans la fonction publique. »
[Vous aviez encore un doute ? Le « libéral » Delanoë pense que son parti doit être le parti des fonctionnaires. Le « libéral » Delanoë pense que le chômage se résout en créant massivement des emplois dans la fonction publique. Encore une petite couche ?]
« La gauche a toujours été le parti de l’impôt, c’est-à-dire des revenus de l’Etat : elle doit avoir le courage de le rester, à l’heure où la justification même de la contribution collective à la richesse de la nation est remise en cause. »
[Que dire de plus ? Peut-on davantage se foutre de la gueule du monde ? Oui ! Il peut le faire ! Un socialiste peut toujours vous la mettre plus profond ! Rien ne lui fait peur ! Après s’être prétendu libéral, puis avoir démontré point par point qu’il était toujours un étatiste forcené, Delanoë s’attaque à Sarkozy au motif qu’il serait, lui, trop étatiste !]
« Sarkozy n’est pas libéral, il est conservateur. Il l’a prouvé à plusieurs reprises : étatiste, protectionniste, il impose à tous les échelons l’omniprésence d’un Etat que dans le même temps il désarme. »
« -- Va-t-il réaliser des réformes que la gauche n’a pas faites ou pas osé faire ? -- Ah oui ? Lesquelles ? La couverture maladie universelle ? La réduction du temps de travail ? À moins que vous ne fassiez allusion au RMI, à la CSG? »
[La CMU, les 35 heures, le RMI, la CSG… que des réformes ultra-libérales, c’est évident.]
« Que fait-il pour réduire la dette publique accumulée sous Chirac ? Rien. Au contraire, le déficit s’accroît. De la même manière, qu’a fait Nicolas Sarkozy depuis un an pour renforcer les capacités économiques de la France ? »
[Mais créer des millions d’emplois de fonctionnaires comme le préconise Delanoë, maintenir le niveau des prélèvements obligatoires à leur niveau délirant, ça, bien sûr, c’est le bon moyen de réduire la dette et de renforcer les capacités économiques de la France.]
« C’est le propre du capitalisme de s’adapter pour trouver de nouvelles sources de richesses. A nous de l’y contraindre. »
[Voilà. La contrainte, toujours. Et ça commence par te jouer les violons de la liberté… En fait, pour Delanoë, le capitalisme, c’est un outil au service du socialisme. Les patrons doivent être les esclaves de l’Etat. Rien de changé par rapport à la mentalité des politiciens français d’aujourd’hui. Voilà en quoi consiste la révolution ultra-libérale du chef des bobos...]
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/politique/20080521.OBS4897/delanoe__oui_je_suis_liberal_et_socialiste.html?idfx=RSS_notr
Rédigé par : Robert Marchenoir | samedi 24 mai 2008 à 15h29
Ce que ferait Delanoe SI il parvenait un jour au pouvoir m'importe peu pour l'instant. L'important, c'est qu'il se soit affiché libéral. Cela doit conduire un certain nombre de français, jusque là prévenus contre le libéralisme à s'interroger, éventuellement à s'intéresser aux vertus du libéralisme. Rien que cela constitue une avancée importante.
Rédigé par : michel | samedi 24 mai 2008 à 20h46
Comme je l'ai écrit, la vision du Libéralisme de Delanoë est pour le moins "altérée" (alternative ?) et fait logiquement "pouffer" les vrais libéraux par certains aspects.
Mais comme l'a très bien résumé Michel, désormais, les libéraux pourront plus facilement exprimer des idées sans être automatiquement voués aux gémonies: des socialistes importants ont rejeté la "condamnation mécanique" du libéralisme. Des socialistes important ont admis une certaine comptabilité entre le libéralisme et leur vision du "social".
Le "libéralisme" Delanoeen ressemble au détournement du mot "liberal" opéré par les américains. En gros, vous êtes libres de gagner beaucoup pour en donner beaucoup à l'état. Vous êtes libres d'être esclaves, en quelque sorte.
Je pense que de fait, le "libéralisme anti économique" de Delanoe permet d'ouvrir la voie à de vraies propositions économiquement authentiquement libérales des libéraux "de droite" (segmentation un peu caricaturale, mais passons). A nous de prouver que ces propositions économiquement libérales sont aussi "sociales de fait".
Si on y arrive, il y a un boulevard libéral qui s'ouvre pour les prochaines années. Si le NC, le PLD, AL et les réformateurs arrivent à ne pas se tirer dans les pattes, j'espère que l'on verra des choses intéressantes.
Rédigé par : vincent | dimanche 25 mai 2008 à 00h08
Pourquoi pas? Mais ce qui me fait peur, moi, c'est le détournement des mots. Déjà, l'anti-libéralisme de la gauche mettait sous l'étiquette libérale des choses qui n'avaient rien à voir. Delanoë opère un deuxième brouillage du concept en le réduisant au régime démocratique et à la résistance à l'oppression.
Maintenant, il va falloir que les vrais libéraux se fassent entendre et expliquent que, contrairement à ce prétend le papa du Vélib, le libéralisme ne consiste pas à multiplier les fonctionnaires et à additionner les impôts.
Quelque chose me dit qu'ils auront moins de temps d'antenne pour cela que Delanoë.
Cela dit, Le Monde expliquait pas plus tard qu'hier que Delanoë et Royal étaient d'accord pour soutenir le libéralisme. C'était avant les récentes déclarations de cette dernière disant que non, décidément, libéralisme c'est un gros mot et c'est incompatible avec le socialisme.
Peut-être que face à ces incessantes contradictions, face à cet innommable foutoir intellectuel, les vrais libéraux auront plus de facilité à faire entendre une voix cohérente, tout simplement parce qu'ils sont, eux, libéraux?
Rédigé par : Robert Marchenoir | dimanche 25 mai 2008 à 19h29
Selon Ségolène Royal, le libéralisme «fournit de la violence». Elle a pas été sous-ministre de l'Education nationale, un moment? Le niveau baisse.
Selon Bertrand Delanöe, comme mesures libérales introtuites par la gauche, il y a l'abolition de la peine de mort, la parité et le PACS. Ca se confirme: le "libéralisme" de monsieur Paris-Plage, c'est juste une nouvelle étiquette sur le gauchisme culturel et le politiquement correct.
http://www.lefigaro.fr/politique/2008/05/25/01002-20080525ARTFIG00153-delanoe-replique-aux-critiques-de-royal.php
Rédigé par : Robert Marchenoir | dimanche 25 mai 2008 à 20h05
Lorsque Madame Royal affirme que socialisme et libéralisme s'excluent l'un l'autre, elle n'a pas tort. Le dogme principal du socialisme, en effet, est un système d'organisation sociale fondé sur la propriété collective des moyens de production, et l'avénement d'une société sans classe. Cette philosophie inspirait d'ailleurs encore le programme commun de la gauche de 1981, et ce sont ses effets catastrophiques qui ont conduit les socialo-communistes au pouvoir à en limiter l'application. Par la suite, le gouvernement Jospin a renoncé à appliquer une politique résolument socialiste, car elle n'était pas réaliste, ni praticable au sein de l'Europe. Faute de pouvoir renouveler l'expérience désatreuse des nationalisations, il a gardé du dogme l'appétit vorace de l'état pour s'approprier par l'impôt les fruits de l'entreprise et du travail des entrepreneurs pour en répandre la manne dans le cadre de l'Etat providence, et cela dans un climat de suspicion proche de l'hostilité à l'égard de l'entreprise, des entrepreneurs et de ceux qui réussissent. Au PS, on "n'aime pas les riches", même quand on ne dédaigne pas s'enrichir soi-même. A défaut d'être socialiste, cette méthode est caractéristique de la social-démocratie. Aujourd'hui, le Parti Socialiste réunit pêle mêle des nostalgiques du marxisme, des socialiste purs et durs, de plus en plus de socio-démocrates, et quelques pragmatiques qui cherchent des solutions qui fonctionnent tout en restant acceptables par leurs camarades de parti et par des électeurs abusés par plus de trente années d'Etat providence. Dans ces conditions, il est illusoire d'attendre une politique libérale d'un pouvoir issu du socialisme français. Le nouveau credo libéral est utile à ceux des socialistes qui pensent qu'il peut allécher des électeurs de droite, en affirmant que la droite est conservatrice et étatique dans son ensemble, et que la gauche offre une alternative qui répond à leurs aspirations de liberté et d'équité. Pour l'instant, on nage dans l'hypocrisie des maneuvres politiciennes, on ne voit pas apparaître de lignes directrices claires. A mon avis, ceux qui, au PS, seraient enclins à choisir une voie relativement libérale, ne pourront jamais s'imposer, et sont condamnés à finir marginalisés ou exclus comme Bockel. Le vieux PS du Congrès d'Epinay n'a plus d'âme. Il ne pourra pas longtemps faire coopérer des Mélenchon et des Valls, des Emmanuelli et des Delanoe...Il ne pourra non plus convaincre à la fois des électeurs qui demandent à l'Etat d'être une vache à lait, et d'autres électeurs qui n'aspirent qu'à voir leur travail et leur talent récompensé. La scission me parait probable, et elle pourrait déjà s'amorcer au prochain congrès.
Rédigé par : michel | lundi 26 mai 2008 à 09h53
Une scission du PS? Je ne suis pas péessologue, mais ça serait une vraie bonne nouvelle. Une occasion de faire bouger les choses, et de marginaliser les gauchistes. Et puis tout ce qui peut déstabiliser le PS est bon à prendre.
Rédigé par : Robert Marchenoir | lundi 26 mai 2008 à 12h00
Dans le même genre: Jean-Marc Ayrault vient d'offrir un livre à François Fillion en guise de "rappel à l'ordre". Un livre de qui à votre avis? Marx? Engels? Rosa Luxembourg? Jaurès? Bloum?
Non! Un livre de Tocqueville! "De la démocratie en Amérique" en l'occurrence.
Un socialiste qui offre l'oeuvre majeure d'un des plus grand penseurs libéraux à un membre de l'UMP…
Mais Jean-Marc Ayrault a-t-il vraiment lu le livre qu'il à offert? Est-il bien placé pour donner des leçons de libéralisme, lui qui, comme son parti, et comme les autres d'ailleurs, est foncièrement anti-libéral?
Sinon Vincent, je relisais cet excellent billet et je me demandais: as-tu vraiment été syndicaliste? C'est pas grave tu sais ;) Mais genre quoi? CGT? FO? :D
Rédigé par : Mateo | mercredi 04 mars 2009 à 21h26
@ Mateo: oui, décidément, ma page "à propos" n'était pas à jour.
Et oui, je confesse mon passé trouble, j'étais chez...
FO, le syndicat qu'est beau
FO, le syndicat qu'il vous faut (Coluche)
J'étais Jeune, j'étais con...
C'était du temps de Bergeron.
Rédigé par : vincent | mercredi 04 mars 2009 à 23h40
Merci pour la réponse Vincent. J'essaierai de ne pas (trop) te chambrer ;)
Plus sérieusement, tu peux t'en servir d'argument lors d'éventuels débats contre les gauchos ;)
Rédigé par : Mateo | jeudi 05 mars 2009 à 23h23