Le plan Paulson pour
juguler la crise financière en cours va exiger un effort du
contribuable américain de 1500 milliards de dollars, sans la moindre
garantie de succès. L'ampleur de ce désastre financier doit
énormément à la prétention des urbanistes professionnels de contrôler
le développement des villes en lieu et place des forces du marché, par
le biais de lois de gestion du foncier malthusiennes. Vous ne voyez pas
le rapport entre un zonage urbain et la faillite du système bancaire ?
Et pourtant ! Lisez cet article, il vaut 3 500 milliards de dollars...
Jusqu'ici, vous avez pu lire en long, en large et en travers, dans la
presse spécialisée comme dans les grands quotidiens, une foule
d'analyses sur les dérèglements du système bancaire américain et
international censées expliquer le séisme financier que nous sommes en
train de vivre. En France, fort rares sont ceux qui défendent, comme
moi, la thèse que ce krach est issu d'un excès
d'interventions mal à propos de l'état américain
sur le marché financier. Au contraire, aux USA, cette hypothèse, si
elle reste minoritaire dans les médias mainstream, commence tout de
même à faire son chemin.
Mais très rares sont ceux qui analysent finement le volet purement
immobilier de la crise. Ce point mérite pourtant que l'on s'y attarde
de très près, car après tout, les graves désordres que connaît le
système financier mondial ont commencé lorsque le pourcentage
d'emprunteurs incapables de rembourser leurs prêts immobiliers a
soudainement été multiplié par plus de deux.
Le début de l'histoire: John Doe
est chez son courtier en prêts immobiliers
Rappelons que tout commence dans le bureau d'un Mortgage Broker,
courtier en prêts immobiliers, lequel reçoit un client à risques. Comme
ceux qui suivent ce blog depuis quelques semaines, il sait que les
banques auxquelles il proposera le dossier auront du mal à justifier un
refus sur des critères économiques, surtout si le client appartient à
une minorité, du fait de la loi CRA déjà abondamment évoquée ici. Il
sait également que la banque ne devrait pas avoir de difficulté à
trouver un refinanceur pour son prêt, car Fannie Mae et Freddie Mac,
sous la tutelle du ministère du logement, sont obligées par la loi de
racheter un grand nombre de crédits subprime, malgré les risques que
cela fait courir à leur solvabilité.
Le courtier, qui a tout intérêt à « fourguer » le
client, même peu solvable, aux banques, afin de toucher sa
commission, est donc prêt à faire une offre susceptible de
rassurer John Doe, l'emprunteur en face de lui. Seul problème,
John Doe n'est pas stupide. Il comprend très bien que le prêt qu'on lui
propose, à taux variable, voire à remboursement du principal différé,
risque de lui poser des problèmes de trésorerie d'ici deux à trois ans.
C'est alors que le courtier sort son argument massue: Indice de
Case-Schiller* en mains, il montre à John Doe que son bien immobilier
prend 10% de valeur au minimum chaque année depuis 1998 (cf. courbe ci
dessous), qu'il n'y a aucune raison que cela s'arrête puisque
l'économie va bien (John Doe n'est pas économiste), et que dans le pire
des cas, si John Doe a une difficulté à honorer ses traites, il n'aura
qu'à vendre son bien, payer le capital restant dû par anticipation, et,
avec le reliquat résultant de la plus value, recommencer l'opération,
éventuellement sur un logement plus modeste.

A bubble ? What bubble ?
John Doe se laisse convaincre et signe. Patatras, au moment où les difficultés prévisibles se matérialisent, des milliers de John et Jane Doe se trouvent dans le même cas et veulent vendre en même temps. Au même moment, les taux d'intérêts remontent légèrement, car la période euphorique de taux très bas qui a précédé à avivé certaines tensions inflationnistes. Trop de vendeurs, plus d'acheteurs: les prix s'écroulent ! Résultat, John Doe arrête de payer ses mensualités, et Fannie Mae (ou Freddie Mac) se retrouve avec sur les bras une maison saisie qu'elle ne peut que revendre à prix bradé. Vous connaissez la suite.
Des situations géographiquement très contrastées
La question qui se pose donc est de savoir pourquoi les prix ont autant augmenté, de façon aussi déconnectée du revenu des ménages.
L'explication la plus courante lue dans la presse est désarmante de simplicité: la baisse des taux d'intérêt consécutive aux attentats du 11 septembre a permis aux ménages d'emprunter beaucoup plus, le crédit étant moins cher, et a donc fait monter les prix. Mes lecteurs de longue date savent que cette explication est abusivement simpliste, mais pour les autres, rappelons quelques bases .
Le tableau -- téléchargeable depuis cette page -- compilant les index Case-Schiller de 20 des plus grandes agglomérations du pays, nous indique qu'en base 100 au 31 décembre 1999, l'indice moyen sur tout le pays a atteint son pic vers juillet 2006, aux alentours de 206 points.
Mais vous verrez également que sur les 20 agglomérations test, trois n'ont pas du tout suivi la tendance générale. Il s'agit de Dallas, Atlanta, Cleveland, lesquelles ont enregistré une hausse de seulement 20 à 35%. L'indice Case Schiller étant un indice en dollars courants, si l'on corrige de la hausse du revenu des ménages -- en dollars courants aussi --, l'on peut dire que dans ces trois villes, les prix sont restés quasi stables (+0 à Cleveland, +13% à Atlanta).
En revanche, à Los Angeles ou San Francisco, l'index est passé par un maximum de 250 à 280 points, indiquant donc un plus que doublement des prix, même corrigés du revenu des ménages, en 7 ans. Si on compare le ratio prix médian du logement/revenu médian des ménages, on peut dire que le logement coûte de 2,5 à 3,5 fois plus cher en Californie que dans les grandes agglomérations du Texas.
Si la faiblesse du marché de Cleveland se comprend aisément par le déclin démographique fort important de cette vieille cité industrielle qui cherche en vain un second souffle depuis des années, il n'en va pas du tout de même pour Dallas et Atlanta, ainsi que pour Houston -- qui bizarrement n'est pas incluse dans l'index de Schiller bien qu'elle soit aussi peuplée que Dallas et bien plus que Portand et Cleveland, entre autres – dont les prix suivent la même évolution.
En effet, ces trois cités sont, et de loin, les 3 qui ont gagné le plus d'habitants aux USA depuis les années 80, ayant pratiquement doublé leurs populations respectives en moins d'un quart de siècle ! On ne peut donc pas, bien au contraire, expliquer cette disparité régionale par une faiblesse de la demande, et l'existence de ces trois villes, et d'une dizaines d'autres agglomérations « moyennes » (à l'échelle US !) non incluses dans l'indice (ex. Austin, Kansas City, Omaha...) qui sont dans la même configuration, montre qu'il est possible de concilier attractivité très forte, demande parfois stratosphérique, et prix raisonnables.
To bulle or not to bulle ?
La raison en est simple: de nombreuses études académiques ont montré que ces villes se sont dotées de réglementations d'urbanisme souples permettant à ceux qui veulent construire des logements de trouver sans problème du terrain prêt à construire à des prix raisonnables. Au contraire, dans les villes chères, existent des réglementations dénommées « smart growth policies » qui ont pour effet de rendre très difficile, voire parfois impossible la transformation de terrains vierges en terrains constructibles.
Lorsque la demande est faible, la différence de prix entre cités « libres » et cités « à sol planifié » reste faible. Mais lorsque la demande est dopée par le crédit bon marché, là où les villes libres s'étendent simplement en périphérie et édifient rapidement les maisons demandées par le marché, les constructeurs des villes planifiées doivent faire face à de véritables barrières procédurières pour trouver les terrains nécessaires à leurs opérations: il se créée donc une véritable compétition entre acheteurs potentiels pour s'accaparer les logements disponibles, les vaincus devant se rabattre sur des habitations situées dans des villes éloignées parfois de plusieurs dizaines de kilomètres du principal bassin pourvoyeur d'emplois, pour retrouver des niveaux de prix sinon faibles (les banlieues aussi ont un droit des sols contraignant !), du moins raisonnables.
Et dès que le coût du crédit se renchérit à nouveau, les villes planifiées voient leurs prix chuter, alors que les variations de prix dans les villes libres restent faibles. Bref, les marchés à sol planifié sont très « bullaires », alors que ceux des villes au sol libre sont marqués par une grande stabilité (cf. exemples ci dessous).

Bubble...

No Bubble !
(J'ai expliqué en détail le rôle des réglementations foncières dans la formation des bulles immobilières dans cet article très détaillé, ou encore celui ci, un peu plus simple)
Combien les sur-réglementations ont elle coûté ?
On peut donc se demander quelle est la part de responsabilité de ces réglementations foncières dans la crise actuelle. En effet, l'on pourrait se dire que si toutes les villes américaines avaient eu un droit des sols de type "texan", à la fois libéral et respectueux du droit de propriété et de l'environnement: on peut y construire à peu près n'importe où, mais généralement pas n'importe quoi, et le foncier bon marché rend facile le respect de quelques normes environnementales bien moins respectées par les lotisseurs de Californie ou de l'Oregon.
De fait, de superbes maisons se trouvent facilement à moins de 200 000$ à Houston. Au plus fort de la bulle, vous ne pouviez pas espérer trouver des biens de qualité identique à moins de 900 000$ à San Francisco. Et, je le répète, la réputation de vie agréable qui s'attache à la Californie n'explique pas la différence: l'agglomération de San Francisco a vu sa population stagner pendant les 15 dernières années de hausse immobilière, quand, dans le même temps, Atlanta, Houston et Dallas gagnaient plus d'1,2 millions d'habitants. Les villes les plus attractives ne sont pas celles que l'on croit !
De fait, de nombreux acheteurs dans les villes fortement réglementées ont, à cause de cette sur-réglementation, surpayé leur maison. Sans doute nombre d'entre eux auraient puprétendre au marché des prêts « prime », moins risqués, si le prix du bien qu'ils avaient acheté n'était pas sorti des limites habituelles du marché, impliquant des taux d'efforts de remboursement bien plus raisonnables, et des risques de banqueroute personnelle bien plus faibles ! De fait, en Californie, moins de 10% des crédits ouverts étaient de type « subprime » en 2000, contre plus de 31% en 2006 ! Il n'est pas rare de voir des familles consacrer plus de 70% de leurs revenus au paiement d'un crédit, là où leurs mensualités auraient pu être divisées par 2,5 à 3,5 si le droit des sols de leur ville d'accueil avait été aussi libéral qu'au Texas ou en Géorgie, et donc si le prix d'achat de leurs maisons avait suivi la même courbe que dans ces cités bon marché malgré leur dynamisme -- et sans doute dynamiques en grande partie grâce à leur immobilier bon marché.
L'encours de crédit immobilier aux USA était de 12 100 milliards de dollars fin 2007, dont 10 542 milliards ouverts à des familles (le reste étant le fait d'investisseurs individuels dans le locatif, plus rarement d'emprunteurs publics).
La question se pose donc de savoir quelle est la part de cet encours qui correspond à une surévalution artificielle des valeurs immobilières. Autrement dit, de combien de milliards de dollars l'encours de crédit, et donc l'exposition totale au risque de défaut du système bancaire, auraient-ils été réduits si toute l'Amérique avait géré son sol comme Houston ?
3 500 milliards ? 4 000 milliards ?
Wendell Cox, consultant économiste spécialiste des questions urbaines, et entre autres titres enseignant à l'école nationale des Arts et Métiers (il passe deux mois par an à Paris), s'est essayé à évaluer cette somme, dans une étude réalisée pour le compte de la Heritage Foundation. Wendell compile depuis des années d'immenses quantités de données qui lui permettent d'analyser, agglomération par agglomération, les prix, les flux migratoires, et des dizaines d'autres données urbaines dans plus de 100 agglomérations d'amérique du nord et de bien d'autres dans le monde. En analysant l'évolution des prix des 50 plus grandes agglomérations américaines, il constate que les 20 plus chères d'entre elles sont toutes dotées de réglements de planification stricte de l'usage des sols, et qu'elles concentrent plus de 80% de l'augmentation de la valeur nominale du stock de logements sur l'ensemble du territoire américain (cf. image ci dessous).
De fait, en supposant que cette surévaluation du stock de logements suit à peu près celle de l'encours de crédits, (ce que la répartition des flux migratoires entre agglomérations en expansion ou en déclin ne semble pas contredire), il parvient à la conclusion que l'encours total des crédits immobiliers aurait été moins élevé de 4 800 milliards de dollars, soit, en corrigeant ce montant de l'augmentation du revenu courant des ménages, une moindre exposition au risque de 4000 milliards.
Stupéfait par ce chiffre (4000 milliards sur 12 000 !), j'ai tenté de le recouper avec mes pauvres ressources – je n'ai pas les bases de données de Wendell ! -- en me basant sur les seuls 10542 milliards d'encours des prêts issus pour des ménages en l'an 2007 (source FED).
En 2000, cet encours était, en dollars courants, de 4820 milliards. Par conséquent, l'encours net, c'et à dire 4820 milliards + les nouveaux prêts émis – le capital remboursé en 7 ans, a augmenté de 5722 milliards, une augmentation de 118%, alors que les revenus des ménages n'augmentaient que 19% !
Sachant que les 40 cités concentrant 83% de la hausse de valeur du stock de logements ne représentent que 26% de la population totale du pays, et – coupable approximation de ma part, faute d'avoir su trouver les bonnes données – en supposant que cette proportion soit restée constante sur 7 ans (un rapide compte sur le site du Census montre que cette approximation n'est certainement pas injustifiée), j'arrive au constat que sur les 5 700 milliards d'augmentation de l'encours (soit 4800 milliards corrigés du revenu des ménages), 3400 milliards au moins correspondent à une surévaluation artificielle des coûts d'achat des maisons dans les villes les plus chères**.
La fourchette de 3400 à 4000 milliards de surexposition des banques au risque immobilier lié aux lois foncières semble donc tout à fait plausible.
Le malthusianisme foncier, amplificateur de la crise
Par conséquent, s'il n'avait pas existé de lois de zonage malthusien dans un certain nombre d'agglomérations américaines, l'exposition au risque des banques sur les prêts qu'elles ont ouvert aurait été plus faible d'environ 3500 milliards sur 10500 ! 3500 milliards, c'est deux fois et demie plus que l'augmentation des lignes de crédits demandées par Hank Paulson fin juillet et fin septembre pour financer sa gestion de crise. Voilà qui donne à réfléchir.
Certes, il faut pondérer ce résultat par le fait que si les prix des maisons avaient été plus faibles, un certain nombre de ménages modestes qui s'étaient sagement tenus à l'écart du marché y auraient tenté leur chance. Et donc l'encours total n'aurait pas été de 7500 milliards de dollars, mais légèrement plus élevé.
Mais toujours est il qu'avec un grand nombre de clients qualifiés en prêts « prime » plutôt que « subprime », des clients consacrant une part de leurs revenus bien moins élevée à leurs remboursements de crédit, et donc un risque défaillance bien moindre, la baisse de solvabilité des ménages qui vient d'intervenir n'aurait en aucun cas provoqué de tels dégâts.
D'autant que, si nous retournons au début de cet article avec John Doe dans le bureau de son courtier, que ce serait-il passé dans ces conditions ? Le banquier n'aurait pu utiliser l'argument spéculatif de l'augmentation sans fin de l'immobilier, et dans de telles conditions, bien des John Doe, quel que soit l'attrait de l'accession à la propriété, auraient dû se montrer plus raisonnables qu'ils ne l'ont été. En outre, les banquiers, Fannie et Freddie, ne pouvant compter sur une réévaluation « magique » des logements, auraient dû admettre que le premier critère à considérer pour caractériser la solvabilité d'un emprunteur est sa capacité de remboursement, et pas la valeur, réelle ou putative, du bien acheté.
Peut-on pour autant affirmer que sans lois foncières restrictives, il n'y aurait pas eu de crise ? Clairement, non.
Le cas de Cleveland, ou les prêts subprime ont fait de véritables ravages, alors que l'immobilier y était en augmentation faible, nous montre que même dans un marché à bas prix, la mécanique perverse des incitations au prêt facile engendrées par Fannie, Freddie et l'extension du CRA, était susceptible de déclencher à elle seule des ouvertures de crédits "pourris".
A l'inverse, la France, qui connaît une bulle foncière sévère (elle aussi en train d'éclater), mais dont le système de refinancement du crédit s'appuie très peu sur la titrisation et beaucoup sur des dépôts bancaires, ce qui est plutôt sain, et dont les banques sont régies par des lois qui poussent à la prudence plus qu'à l'aventurisme – Cela n'empêche quelques un de ces établissements de conaître quelques soucis --, ne connaît pas de crise de défauts de paiements, quand bien même elles seront impactées par la crise du fait de leurs connexions internationales.
Il ne faut donc pas se tromper de cible: le déclencheur du marasme est bel et bien un grave dysfonctionnement du système américain de financement du crédit. En revanche, les réglementations foncières d'une douzaine d'états concentrant près d'un tiers de la population ont agi comme un très important amplificateur de la crise. Sans ces lois, dont on rappelle qu'elles constituent un viol flagrant du droit de propriété, l'augmentation des défaillances liées à la remontée des taux aurait été plus que limitée, et la crise du subprime n'aurait pas dépassé le stade d'articles de spécialistes dans les suppléments « économie » des grands quotidiens.
En finir avec les marchés bullaires pour préserver l'avenir
Il nous est souvent affirmé que sans les lois de planification
urbaines, l'étalement urbain qui en résulterait nous plongerait dans
une succession de calamités écologiques et fiscales incommensurables.
Outre que cela est très contestable – et largement contesté sur ce blog
(voir également ici) --,
il faut en toute chose mettre en rapport les avantages d'une
législation et ses inconvénients.
Au motif de se préserver d'évolutions environnementales incertaines et lointaines, et de faire baisser à la marge les coûts du transport scolaire et du ramassage d'ordures ménagères, de nombreux états et collectivités locales, de par le monde, continuent de justifier l'emploi de méthodes de planification spatiale dont la liste des effets pervers immédiats et de grande ampleur s'allonge année après année. Mes lecteurs savent déjà que ces lois ont des effets sociaux contestables en terme de transferts de richesses et d'accessibilité des prix du logement, et favorisent une corruption des moeurs politiques de grande ampleur. Désormais, il convient d'ajouter les risques que des marchés immobiliers bullaires, de par leur ampleur, en combinaison avec un système bancaire dysfonctionnel, font courir au système monétaire international !
Combien de temps, de cris d'alarme et de crises financières faudra-t-il pour que les politiciens prennent sérieusement en compte l'impact de leurs lubies et de celles des technocrates qui les conseillent ? Il faut d'urgence en finir*** avec les lois de rationnement foncier qui favorisent la formation et l'éclatement de bulles dont les dégâts économiques ne seront peut-être pas toujours rattrapables, fût-ce par la première puissance économique du monde.
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Retrouvez tous les articles concernant la
crise des subprimes parus sur Ob'lib'
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Notes
* Index Case
Schiller: Indice des prix immobiliers aux USA, établi par
deux économistes universitaires (Yale) du même nom.
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** Méthode de
calcul: en supposant, d'après les données de W. Cox, que la
surévaluation des villes planifiées, représentant 26% du parc de
logements, n'était que de 25% par rapport aux autres en l'an 2000, date
de démarrage de la bulle, j'ai calculé ce qu'aurait été l'encours en
2007 si la hausse des prix dans tout le pays avait suivi l'index Case
Schiller moyen d'Atlanta (environ 1,35 au sommet de la bulle), ce qui
me donne 6500 milliards de dollars, soit 4000 milliards de moins que
l'encours réel, et j'ai corrigé par la hausse du revenu médian des
ménages américains (19% en dollars courants sur 7 ans) pour en déduire
une surexposition au risque de crédit de 3400 milliards.
Ce montant est sans
doute assez conservateur: la surévaluation aurait dû être calculée sur
l'ensemble des prêts originés, et pas uniquement sur la différence
entre prêts originés et volume de capital
de prêts anciens remboursés. En contrepartie, en toute rigueur,
j'aurais du pondérer par l'évolution du revenu moyen dans les groupes
d'agglomération homogènes de mon échantillon, et m'assurer plus
finement que la répartition géographique des prêts n'a pas
significativement modifié la répartition du parc de logements entre
villes chères, villes bon marché (en additionnant celles qui sont en
plein boom et celles qui déclinent). Je pense que ces
approximations introduisent un risque d'erreur tout à fait acceptable
sur une période ramassée de 7 ans.
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*** Visiblement,
les Californiens, bien que principales victimes de la crise du
subprime, n'ont pas compris la leçon. Comme je le relatais il y a trois
semaines, la Californie va renforcer ses lois anti-étalement
urbain,
pour lutter contre les hypothétiques dommages à très long terme des
émissions de CO2 ! Tant d'aveuglement laisse pantois.
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Votre démonstration est impeccable. Ce qui m'inquiète, c'est que le même phénomène de bulle immobilière s'est produit au même moment en France, et que le retournement de tendance commence à se faire sentir. Certes, les banques françaises ont été moins laxistes que les américaines. Tout de même, le ratio généralement observé est d'accorder un prêt dont les remboursements correspondent à 1/3 du revenu des ménages emprunteurs. En période de stabilité économique et de baisse du chômage, un tel endettement était supportable. Quoiqu'il faut également considérer l'inflation de crédits à la consommation, sous forme de crédits revolving notamment, ces crédits apparement attractifs mais dont les durées de remboursement s'éternisent. L'abus du recours à ces crédits met un nombre important de foyers, déjà endettés pour l'achat de leur logement, dans une situation...disons très limite !
Or, à l'évidence, nous allons subir une longue période de récession. Nombre de ménages déjà très endettés vont affronter le chômage, la baisse de revenus (perte de la part des salaires assise sur résultats, baisse d'activité pour les artisans et comerçants...). Et la valeur de leur logement ne couvrira pas toujours le montant de leurs dettes, souvent augmenté de pénalités et intérêts de retard ... Alors, sommes-nous mieux lotis que les américains ? quid de nos banques, déjà sanctionnées sur leurs opérations subprime américaines, y ajoutant les pertes de patrimoine dues à la dégringolade boursière, si elles doivent faire face à une cascade de défaillances d'emprunteurs particuliers, sans oublier les défaillances d'entreprises clientes ?
Rédigé par : michel | lundi 29 septembre 2008 à 12h41
une bonne mesure à prendre.
Demander à chaque banque de s'engager en début d'année sur un taux de couverture minimum de son choix, l'obliger à l'afficher sur la devanture de toutes ses agences et à l'imprimer sur ses papiers à en-tête, contrats et publicités.
... puis laisser le client choisir.
Rédigé par : Alf | lundi 29 septembre 2008 à 17h55
Je rebondis sur le commentaire de Alf (et je recycle mon commentaire du blogue du QL) :
Le vrai pb (même si je ne nie pas que l'Etat ait une part de responsablité dans ce que nous vivons aujourd'hui), le vrai pb n'est-il pas que les épargnants donnent leurs économies aux banques sans regarder ce qu'elles vont en faire et en tenant pour garanti (au besoin par l'Etat comme on le voit actuellement) que ces banques lui restitueront plus tard la somme plus les intérêts ?
Bref, dire au péquin moyen que le libéralisme ça marche sur le long terme, qu'il n'y a pas besoin de régulation de l'Etat, OK.
Mais lui dire que ça marche à tous les coups sans qu'il ait seulement à surveiller ce que les banques font de ses économies, n'est ce pas préparer des crises futures que l'on imputera alors à tort au libéralisme ? N'est ce pas faire le lit de l'étatisme ? Est ce que l'inconscience des épargnants, leur confiance aveugle dans les banquiers (qu'ils traitent néanmoins de voleurs ;-) n'est pas la cause même de cette crise ?
Bref, est ce qu'il ne faut pas dire aux gens : "Oui, dans un système libéral, des banques font parfois faillite et donc il vous faut les surveiller pour ne pas perdre vos économies. C'est un inconvénient certes. Mais dans un système étatiste vous y perdez encore plus car l'irresponsabilité généralisée est renflouée par vous. C'est ce que l'on voit actuellement" ?
Rédigé par : Le Champ Libre | lundi 29 septembre 2008 à 18h24
les banques on déjà passé a peu près 600Mrds le plan Paulson parle de 700Mrds, cela fait 1300Mrds, en imaginant que les banques soit capable de monter à 1000 Mrds, cela fait un total de 1700Mrds...
Quelle est le montant totales des pertes qui resterait à passer??? je n'arrive pas à avoir une estimation du taux de subprime par rapport à tout les crédits... Quelqu'un sait???
Juste pour savoir si je doit me jeter par la fenêtre lol
Rédigé par : mica | lundi 29 septembre 2008 à 23h28
Vincent Benard president !
Rédigé par : Pierre | mardi 30 septembre 2008 à 06h12
@ Le Champ Libre,
En économie capitaliste, le rôle des banques est crucial. La banque est un moteur de l'économie, un vecteur d'argent qui permet d'acccélérer la circulation monétaire, en transférant l'épargne vers le financement de la production et de la consommation. La banque est créatrice de monnaie scripturale, une monnaie immatérielle qui se présente sous un aspect purement comptable de transferts de compte à compte. La banque prête plus d'argent qu'elle n'en reçoit en dépôt. Le système fonctionne parce que les déposants ne viennent pas retirer leur avoir tous en même temps. Ce système ne repose que sur la confiance des divers agents économiques. Que la panique s'installe et que les déposants se ruent en masse vers les banques pour retirer leur argent, et les banques doivent fermer leurs guichets. Dans un tel contexte, si les pouvoirs publics n'interviennent pas, il n'y a plus d'économie du tout parce que l'argent ne circule plus.
Laisser faire, c'est laisser entreprendre, laisser créer, laisser s'exercer la liberté individuelle, laisser jouir de la propriété. Moins d'Etat signifie seulement que l'Etat ne doit pas outrepasser ses fonctions régaliennes, Mais sa responsabilité demeure entière dans la garantie de l'ordre public, de la sécurité des personnes et des biens, la protection des libertés individuelles. L'Etat ne peut absolument pas laisser s'écrouler le système bancaire et ruiner la confiance dans la banque. Des mécanismes de couverture des risques existent telles que le fond de garantie français et le FDIC américain. Ceux-ci peuvent rempbourser les déposants de leurs pertes dans le cas de faillite isolée d'une banque de moyenne importance, comme il s'en produit parfois en France, et en petit nombre chaque année aux USA. Ces fonds ont des capacités d'emprunt pour affronter des défaillances plus importante, mais ils ne sont pas adaptés à une crise bancaire majeure.
D'accord avec vous pour dire que les banques doivent montrer une transparence absolue dans leurs règles de gestion des dépôts, afin que l'épargnant puisse évaluer la sécurité que lui offrent les banques en concurrence. Mais laisser les déposants dépouillés en cas de défaillances en cascade ne peut aboutir qu'à la destruction du système capitaliste qui a fait notre richesse. Suivant l'ampleur de la crise, les Etats, les communautés d'Etats, ou le système financier mondial doivent intervenir. Sinon, si on laisse aujourd'hui cinq millions de déposants d'une grande banque solidaires de sa faillite, le lendemain ce sont toutes les banques qui ferment et toute la population qui ne peut plus disposer de son argent. Cela rend nécessaire que les efforts soient mutualisés entre l'ensemble des clients de toutes les banques, c'est à dire la population entière, et seul l'Etat a le pouvoir d'organiser cette mutualisation.
Rédigé par : michel | mardi 30 septembre 2008 à 07h11
au moment où j'écris mon précédent commentaire, le Congrès américain vient de refuser le plan Paulson, par dogmatisme libéral. La copie corrigée du gouvernement fédéral ne pourra être présentée à nouveau que mercredi, parce qu'aujourd'hui mardi, on ne travaille pas. C'est une inconséquence grave. Une erreur que la pensée libérale condamne, car le pouvoir se montre incapable d'agir pour la sécurité des biens, un coup de poignard dont vont se saisir tous ceux qui sont prêts à dénigrer les valeurs libérales. Le feu risque de prendre dans les heures qui viennent. Sous pretexte de sauvegarder l'argent du contribuable, le Congrés met en péril immédiat l'argent de tous. Je prie pour que les américains conservent leur sang-froid pendant les deux jours qui viennent !
Rédigé par : michel | mardi 30 septembre 2008 à 07h35
@Michel,
Merci pour votre réponse.
Nous ne sommes pas d'accord à priori.
Vous pensez qu'il faut une garantie de l'Etat sur le système bancaire.
Je pense que non, que c'est aux épargnants, à nous donc, de prendre nos précautions.
Rédigé par : Le Champ Libre | mardi 30 septembre 2008 à 08h44
Vincent,
Merci pour ces nouveaux éclaircissements. Sur le sujet des subprimes, tu es le meilleur depuis le début.
Mon sentiment est que les analyses libérales ou anti-libérales, étatistes ou anti-étatistes sont, en l'occurence, déplacées. Que la crise actuelle soit une pure crise de marché, Vincent nous a bien montré que c'est faux, vu l'implication de l'état américain à tous les niveaux du système financier US.
Mais soutenir qu'il suffirait de laisser jouer les marchés pour prévenir, et régler ce genre de crises me semble tout aussi insuffisant. La crise actuelle trouve une partie au moins de son origine dans un bourgeonnement nuisible du système financier lui-même.
Laisser le marché régler le problème est parfaitement possible et mon tempérament me porte naturellement vers ce type de solution : au moins les responsables seront-ils frappés ! Mais alors il faut être prêt à assumer un effondrement, certes temporaire, du système financier international, jetant à la rue et précipitant la ruine (par la disparition de leurs économies) de millions de gens... avec les conséquences politiques que l'on devine. Possible, donc, oui; mais souhaitable ? Réaliste ? Je ne crois pas.
Merci, Vincent, de nous aider à réfléchir à des alternatives réalistes in concreto, et non seulement dérivées de présupposés idéologiques.
Drieu
Rédigé par : Drieu | mardi 30 septembre 2008 à 11h22
@ le Champ Libre
Vive internet qui permet de dialoguer avec des gens inconnus mais sympathiques. Vous n'êtes pas d'accord avec moi, mais je sens bien que vous respectez mes idées. Je vais essayer cependant de vous convaincre.
Je me définis plus comme un pragmatique que comme un libéral. Pourtant, je nourris un amour ABSOLU de la liberté. Ce que je constate, c'est que toute philosophie, toute idéologie, ne peut s'abstraire des réalités qui dictent les comportements des acteurs de ce monde, et que celui qui se réfugie inconditionnellement dans des dogmes est condamné à subir les leçons de l'histoire.
Le contrat de dépot bancaire est un contrat par lequel le déposant confie à un banquier son argent pour qu'il soit en sécurité. Le banquier, et là on quitte le domaine de la philosophie libérale pour entrer dans celui de l'efficacité économique, utilise l'argent déposé pour créer de la monnaie, prêter et encaisser des intérêts. Il y a comme un hiatus dans ce contrat. D'un côté, le déposant ne veut que la sauvegarde de sa propriété. De l'autre, l'efficacité économique veut que l'argent soit recyclé le plus vite possible dans l'économie. Au final, en situation normale, le déposant et la collectivité sont gagnants.
Je ne vois rien d'anormal à ce que le déposant bénéficie de la solidarité de la collectivité lorsque les choses tournent mal. Et si le libéralisme n'a pas encore envisagé ce cas de figure, c'est le moment de faire avancer la théorie.
Rédigé par : michel | mardi 30 septembre 2008 à 20h18
@ Michel:
"Le contrat de dépot bancaire est un contrat par lequel le déposant confie à un banquier son argent pour qu'il soit en sécurité. Le banquier, et là on quitte le domaine de la philosophie libérale pour entrer dans celui de l'efficacité économique, utilise l'argent déposé pour créer de la monnaie, prêter et encaisser des intérêts."
On ne quitte pas le domaine de la philosophie libérale, et c'est d'ailleurs un des thèmes centraux de Murray Rothbard, un des grands noms du libéralisme, dans son livre "What government has done to our money": en plus de plaider pour un système de monnaies libres, il y dénonce le système de réserve fractionnaire, qu'il considère être une atteinte au droit naturel, en l'occurrence au droit de propriété: il est impossible aux banques de rendre l'argent appartenant à ses clients si ceux-ci le réclament tous en même temps.
C'est donc pour lui un permis de vol ("license for theft"). Ce qui est permis aux banques est interdit pour tous les autres agents économiques (si je viens mettre de l'avoine à l'abri chez toi moyennant finance et que lorsque je veux récupérer mon bien, il n'en reste presque plus rien car tu l'as refilé à quelqu'un d'autre, je pourrai aisément te faire condamner. Pour les banques, et seulement pour elles, le droit est différent, de leur coté).
La question fait débat parmi les libéraux.
Rédigé par : Mateo | mardi 30 septembre 2008 à 21h00
@ Mateo
Votre remarque est tout à fait justifiée. Prêter plus d'argent que l'on en a heurte le sens commun. Le banquier, dans le domaine de la monnaie scripturale, a les mêmes pouvoirs que les banques centrales qui, elles, inondent en ce moment le marché de leur monnaie fiduciaire pour sauver le système, de la fausse monnaie en quelque sorte, mais légalisée par leur statut de banque d'émission, ce qui, je vous l'affirme, va créer une inflation carabinée ! En fait, la monnaie ne constitue pas un bien en soi, ce n'est qu'un médiateur qui permet à l'humanité de travailler en coopération. L'argent n'est pas la vraie richesse. Celle-ci réside dans les réalisations des hommes. L'argent est volatile, et on le constate bien en ce moment.
Les banques ont le privilège, que vous semblez contester, de créer de la monnaie. Mais vous-même, lorsque vous empruntez, n'achetez-vous pas avec de l'argent que vous ne possédez pas et que votre banquier a créé spécialement pour vous ? N'êtes vous pas de connivence avec cette création monétaire ?
Si vous refusez ce système, vous refusez l'énorme effet de levier qui a permis à l'humanité de progresser à pas de géants. Je dirais même qui a permis à la civilisation européenne de prendre un avantage énorme sur toutes les autres qui ne connaissaient pas la banque telle que les Fugger l'ont fait évoluer au XVIème siècle.
Mais, à mon sens, la spécificité du rôle de la banque me fait penser qu'on ne peut pas la considérer de la même manière que les autres acteurs de l'économie, et qu'il est nécessaire de prévoir des contrôles vigilants et adaptés du métier de banquier, d'une part, faute de quoi on risque de lui laisser toute latitude d'abuser de la confiance de ses clients, et c'est bien ce qui s'est produit en Amérique, et que d'autre part la collectivité tout entière doit être prête à se transformer en pompier de la banque losqu'elle brûle.
Rédigé par : michel | mardi 30 septembre 2008 à 21h50
Très intéressant débat ! Vu l'heure tardive, je ne vais pas m'y immiscer, juste deux remarques:
@ pierre: excellent programme politique auquel j'adhère intégralement.
@ Alf: bien que bien des spécialistes vous diront que votre idée est trop simpliste pour fonctionner, je la trouve pour ma part excellente, (sous réserve que le taux de couverture évoqué soit précisément défini).
@ Mica: les prêts subprimes ne représentent que 1500 milliards de dollars, sur un encours total de prêts immob. de 12000 milliards, et un marché de titres qui valait au moins 50 000 milliards avant les dettes récentes. Ce qui me fait dire que la panique actuelle des marchés est une sur-réaction, sans rapport avec les enjeux réels. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes tirés d'affaire. Si la panique se propage aux simples déposants, nous sommes cuits.
Mais ceci dit, perso, je reste assez Zen. La turbulence actuelle concerne une minorité d'emprunteurs immobiliers, et des établissements financiers entre eux. L'économie non financière n'est impactée qu'indirectement.
Je m'inquiète plus des finances publiques de la France et surtout de l'Italie en cas de remontée probable des taux longs demandés aux états emprunteurs trop lourdement endettés.
Ah au fait, encore un réglementation publique à la con, qui transforme un risque "subprime" de moins de 1 000 milliards en un pataquès mondial: le rôle du "fair accounting act" doit être éclairci. Mais un autre jour, je fatigue.
@ Michel, Mateo: merci pour vos très intéressantes contributions. Vous ouvrez de bonnes pistes. Je vais de ce pas finir le bouquin de Rothbard, dont j'ai acheté la traduction française auprès de l'institut Charles Coquelin.
Rédigé par : vincent | mardi 30 septembre 2008 à 23h53
@Michel,
Oui il faut contrôler les banques. Mais ce n'est pas à l'Etat de le faire, c'est aux épargnants qui lui confient leur argent. C'est le moyen le plus efficace de contrôle et le plus juste. (libre à eux de s'en remettre ensuite pour ce contrôle à qqun de plus avisé qu'eux).
Sinon, comme Rothbard que je n'ai pas lu, ou Mateo que je viens de lire, je ne comprend vraiment pas pourquoi les banques peuvent prêter plus d'argent qu'elles en ont et je me demande si le problème n'est pas là aussi.
Rédigé par : Le Champ Libre | mercredi 01 octobre 2008 à 09h30
@ Le Champ Libre
L'important, c'est que la loi précise exactement ce qui doit être contrôlé. Par contre, d'accord avec vous pour dire que l'Etat ne serait pas le contrôleur le meilleur, ni le plus souhaitable. Je verrais plutôt une Haute Autorité indépendante, composée de membres élus par les citoyens (qui sont tous déposants), par les créanciers des banques (dont les banques elles mêmes puisqu'elles se prêtent de l'argent les unes au autres et ont intérêt à la bonne marche du secteur financier), et un nombre minoritaire de représentants nommés par les pouvoirs publics, pour leur bonne information. Cette haute autorité devrait avoir des moyens importants pour suivre les dossiers, réaliser des enquêtes et des audits, publier ses rapports. Elle devrait pouvoir faire des injonctions, infliger des amendes, sanctionner des dirigeants responsables par des suspensions ou interdictions d'exercer, déférer en justice. Ne me dites pas que c'est anti-libéral, car c'est absolument indispensable pour protéger la propriété en argent des citoyens, et la propriété, c'est sacré. La Banque N'EST PAS un commerce comme les autres.
Quand au fait que les banques prêtent plus d'argent qu'elles n'en reçoivent en dépôt, c'est ce qui se fait depuis des siècles. Les banquiers lombards du moyen âge prêtaient à leurs clients non pas en leur remettant des pièces d'or, mais de simples billets à ordre qui circulaient ensuite, comme de la monnaie. Ce sont les Fugger, au XVIème siècle qui ont créé les premiers le système moderne de comptes courants et prêts en compte. Il suffisait d'inscrire au compte du client le montant que la banque prêtait. Il s'agit bien là de création monétaire.
L'avantage du système était de fournir à l'économie des moyens de paiement et d'échanges bien plus importants qu'on n'aurait pu le faire avec les trop rares métaux précieux.
Les billets de banque sont apparus au Xème siècle en Chine, et au XVIIIème siècle en Europe, avec d'ailleurs la formidable faillite de la Banque de Law, ce qui a conduit à réglementer l'émission de ces billets. Les Banques d'émission possédaient une réserve d'or, et créaient des billets représentant plusieurs fois la valeur de leur stock d'or, en garantissant le remboursement de ces billets en métal précieux. En 1944, par les accords de Bretton Wood, seule la banqué d'émission américaine prenait l'engagement de rembourser les US$ en or, les banques centrales des autres pays n'étant tenues que d'avoir une réserve de dollars et de s'engager à rembourser en dollars leurs propres billets. C'était le système du "dollar Gold Exchange Standard".
En 1973 (conférence Pompidou-Nixon aux Açores), le dollar a cessé d'être convertible en or. A partir de ce moment là, la monnaie est devenue une chose immatérielle, représentée par des billets de banque qui n'ont de valeur que par la confiance qu'on accorde à la banque d'émission. C'est la monnaie fiduciaire. La monnaie scripturale, elle, n'est qu'une chose impalpable, virtuelle, matérialisée par des écritures comptables.
Ce système a permis de multiplier et d'accélérer considérablement les échanges commerciaux, mais il est évident qu'il est, disons "casse-gueule" ! Quelques bombes à neutrons au dessus d'un continent, et pfuittt ! plus d'ordinateurs, plus de compta, plus de monnaie...Rappelez-vous de la psychose de l'an 2000 ! Autre cata, panique financière mondiale généralisée, et tout le monde se remet à faire du troc ! Et c'est cela qui empêche de dormir les gouvernants du monde en ce moment.
Voila pourquoi les banques, y compris les banques d'émission, prêtent plus d'argent qu'elles n'en ont ... Parce que depuis la fin de l'étalon or, si cher à de Gaulle, l'argent, les banques n'en ont pas.
Dormez bien quand même, ce soir.
Rédigé par : michel | mercredi 01 octobre 2008 à 18h44
Merci Michel pour toutes ces précisions.
Vous ne m'avez pas convaincu mais je vais continuer à réfléchir à tout ça car ce sont des sujets neufs pour moi.
Sinon je vous signale un très bon article (ce n'est que mon avis bien sur) de Pascal Salin sur la crise actuelle :
http://www.lesechos.fr/info/analyses/4778889--ou-l-echec-d-un-etat-pas-assez-liberal.htm
Rédigé par : Le Champ Libre | mercredi 01 octobre 2008 à 19h29
@ Champ Libre
L'article de Pascal Salin est effectivement excellent, et conforte nombre de mes points de vue (et beaucoup de points de vue de Vincent d'ailleurs). Cependant, Salin nous vante les banques d'un temps révolu, le XIXème siècle, où les banquiers avaient en fonds propres 60% à 80% de leurs engagements. Imposez cela maintenant, et le volume de la circulation monétaire mondiale est divisé au moins par 10 (et plutôt par 20 ou plus vu les artifices des financiers pour développer des produits exotiques "hors bilan"). Vous voyez le problème !
Rédigé par : michel | mercredi 01 octobre 2008 à 21h22
Illustre maître, otez moi d'un doute lol
le plan Paulson est donc amplement suffisant?? ou même les banques auraient elles pu se débrouiller seules??
"transforme un risque "subprime" de moins de 1 000 milliards en un pataquès mondial" Ce qui veux dire???
Question subsidiaire, les alt-A, représente combien??? car en apprenant que ING avait en portefeuille 28 Mrds de titre avec du alt A dedans...
Merci d'avance grand maître!!
Rédigé par : mica | mercredi 01 octobre 2008 à 23h07
@ Michel
Il n'y aucun besoin que la masse monétaire augmente plus vite que les richesses produites.
Je n'ai peut-être pas été clair, mais le système de réserve fractionnaire concerne les dépôts.
Rien n'interdit les investissements ou prêts entre individus, et la banque peut tout à fait jouer le rôle d'intermédiaire.
Il y a une différence entre faire un dépôt à la banque et faire un placement. Dans le second cas, je passe contrat avec la banque pour qu'elle investisse l'argent que je lui prête (en bourse, en faisant des prêts etc.). La forme de ce contrat peut varier: taux garanti ou non, fixe, variable etc.
Il n'y a donc pas fondamentalement besoin de création monétaire pour permettre le crédit.
C'est le point de vue de Rothbard si je ne l'ai pas déformé.
Pour le reste, je suis d'accord sur le fait que la monnaie fiduciaire n'a de valeur que par la confiance qu'on accorde à son émetteur.
C'est en partie pour ça qu'un système de banques et de monnaies libres assure une grande stabilité monétaire (les banques ne pouvant se permettre de créer trop de monnaie puisqu'en voyant la perte de sa valeur, les clients en choisirait une autre), comme l'ont montré les trop rares épisodes de l'histoire où un tel système était en place.
Rédigé par : Mateo | mercredi 01 octobre 2008 à 23h54
PS: le plan Paulson est largement critiquable. Et très bien critiqué par Vincent dans un article récent ;)
Rédigé par : Mateo | mercredi 01 octobre 2008 à 23h58
@Michel,
>> Vous voyez le problème !
ça c'est sur, on voit bien qu'il y a un pb aujourd'hui.
Vous pensez que le développement économique, le progrès que nous avons connu récemment est du à cette masse monétaire en croissance et qui ne correspond à rien et vous condamnez le 19 ième siècle.
Pourtant, le 19 ième siècle a été un siècle de boom économique (révolution industrielle, non ?) et cela, sans que les banques aient eu à se livrer à des acrobaties comme aujourd'hui comme le dit Pascal Salin dans son article.
Je reste dubitatif donc.
Rédigé par : Le Champ Libre | jeudi 02 octobre 2008 à 07h54
@ Le Champ Libre: non, le progrès économique est dû au génie de milliards d'hommes, toujours plus éduqués et informés. Mais, de même que le cerveau à besoin de sang chargé d'oxygène et de glucose, le génie humain doit être nourri par des canaux financiers et de l'argent.
Le 19ème siècle a été un siècle de progrès technologique dans la petite europe et un bout d'Amérique du Nord. Le 20ème siècle a été celui de l'expansion galopante mondiale et de l'enrichissement du monde occidental. Le 21ème siècle sera...j'sais pas quoi.
@ mateo,
1 - Vous avez raison de dire que la masse monétaire ne doit pas augmenter plus vite que les richesses produites. Lorsque cela se produit, il y a inflation, et l'économie se venge en réduisant la valeur du stock d'argent en circulation. Cela dit, souvent, il faut investir avant de commencer à produire, et l'augmentation du volume de monnaie en circulation précède celle de la production.
2 - Je ne me suis intéressé effectivement qu'au fonctionnement des banques de dépôts, et aux opérations dites de banque. Parler de la banque d'affaires nous conduirait à un nouvelle longue discussion. Je ne vous en dirais qu'un mot: je trouve qu'elle ressemble de plus en plus à un casino, avec ses "warrants", ses "futures" et produits dérivés, ses call and put, ses LBO, ses cascades de holdings en poupées russes...et ses Kerviel !Si vous voulez-bien, causons-en un autre jour...
3 "Il n'y a pas besoins de création monétaire pour permettre le crédit". Pas faux ! Le problème serait à considérer autrement. La production doit s'accompagner d'une masse monétaire disponible en rapport. Faute de liquidités, la production ne se vend pas ou se vend mal, on ne paye pas les ouvriers, etc... Il existe des opérations de banque très saines, telles que l'escompte ou la mobilisation de factures,- qui sont des créations de monnaie -, et ont le mérite de s'appuyer sur du solide, des produits marchands. Encore faut-il escompter des effets tirés sur des clients solvables et éviter, ce que font certains escrocs des affaires de vendre à la banque des fausses factures. Idem pour le crédit à la consommation: si on prête à un particulier solvable et honnête pour l'achat d'une voiture ou d'une maison, on permet l'anticipation de la production d'un bien que le particulier n'aurait pu acheter que beaucoup plus tard par sa seule épargne. Lorsque des prêts sont faits pour l'achat de marchandises qui se consomment instantanément (votre caddy payé en 4 mensualités, partez à Tahiti et vous paierez plus tard), c'est plus limite. Quand dix organismes inondent en même temps de publicité un quidam influençable pour lui proposer 2000 euros tout de suite, remboursables par petites mensualités, où lui envoient par la poste une carte de crédit qu'il n'a jamais demandée, c'est du pousse au crime. Quand on délègue à des employés d'hypermarchés la responsabilité de faire souscrire des prêts, il ne faut pas s'étonner que les conneries se multiplient. Vous verrez, les organismes qui pratiquent ce trafic vont se casser la gueule les uns après les autres.
Le plan Paulson: il évite un effondrement imminent et permet de gagner quelques mois. S'il a pour effet de faire durer l'organisation du système actuel, c'est foutu d'avance.
Rédigé par : michel | jeudi 02 octobre 2008 à 12h31
@Michel,
>> Le 21ème siècle sera...j'sais pas quoi.
La fin du bricolage des outils monétaires par nos politiciens ?
On verra.
Rédigé par : Le Champ Libre | jeudi 02 octobre 2008 à 13h23
Une illustration de tout le débat que j'ai eu avec Le Champ Libre, Mateo et les autres commentateurs: tiré du bilan à fin juin 2006 du Groupe BNP-Paribas.
Capitaux propres 56,138 milliards €
Dettes 1 761,06 milliards €
source: http://media-cms.bnpparibas.com/file/08/8/6088.pdf
Autrement dit, la fortune de la BNP ne couvre que 3,2 % de ses dettes totales. Il s'agit pourtant de l'un des groupes financiers européens les plus solides et performants.Il ne fera surement pas faillite...ou alors, il sera le dernier à faire faillite.
Mais supposons. L'Etat français cumule actuellement (fin juin 2008) 1250 milliards € de dettes (31000 € par ménage français quand même !). Les recettes annuelles de l'Etat français sont de 293 milliards (fin 2007), et ses dépenses 335 milliards.
Quand le gouvernement nous dit: je ne laisserai pas une seule banque faire faillite, ne surestime-t-il pas ses moyens ? Parce que BNP n'est pas le seul mammouth financier. Crédit Agricole, Société Générale, c'est kif-kif, et derrière il y a le Crédit Foncier, la Caisse des Dépôts et Consignations (vos retraites hors régime général !), les Banques Populaires, les Caisses d'Epargne, le Crédit Mutuel, et les Assurances AXA, etc...sans compter les filiales françaises d'établissements étrangers.
Pas d'affolement toutefois. Les banques françaises, une majorité de banques européennes, = aux USA je ne m'en rend pas bien compte =, tiennent le cap. L'économie tout entière représente des valeurs autrement plus considérables que tous les chiffres exposés ci-dessus, et la capacité productrice des hommes, des savoir-faire, des équipements, difficiles à traduire en termes comptables, est plus importante encore. Mais il est certain que l'écroulement du système bancaire, par un jeu de domino fatal nous entraînerait dans des désordres gravissimes pendant plusieurs années.
Notre avenir dépend maintenant de notre sang froid, de notre capacité à traverser des temps difficiles, à abolir les errements qui nous ont conduits à la situation actuelle.
Nous y laisserons beaucoup de plumes, il faut en être conscient. Certains d'entre nous plus que les autres. C'est la vie et c'est l'histoire, souvent cruelle, qui passent. Nous avons vécu 60 années de paix et de prospérité. Elles nous ont, hélas, amollis. Nous sommes confronté à un dur retour aux réalités. Et bien, luttons !
Rédigé par : michel | jeudi 02 octobre 2008 à 19h12
@ Michel
"1 - Vous avez raison de dire que la masse monétaire ne doit pas augmenter plus vite que les richesses produites. Lorsque cela se produit, il y a inflation, et l'économie se venge en réduisant la valeur du stock d'argent en circulation. Cela dit, souvent, il faut investir avant de commencer à produire, et l'augmentation du volume de monnaie en circulation précède celle de la production."
L'investissement est un achat de richesses. Pas besoin d'augmenter la masse monétaire pour permettre l'investissement, donc.
"2 - Je ne me suis intéressé effectivement qu'au fonctionnement des banques de dépôts, et aux opérations dites de banque. Parler de la banque d'affaires nous conduirait à un nouvelle longue discussion"
Je ne parlais pas des banques d'affaires spécialement. Je notais seulement qu'un dépôt dans une banque n'était pas le même type de contrat qu'un placement.
Dans le premier cas on confie de l'argent à la banque pour qu'elle le garde (d'où l'opinion de Rothbard pour lequel le prêt de cet argent par la banque est une atteinte à la propriété). Dans le second cas c'est justement pour que la banque l'investisse, dans des prêts par exemple, qu'on lui confie cet argent, moyennant évidemment une (éventuelle) rémunération.
Pour le point 3, je ne suis pas sûr de bien comprendre. Si vous dites qu'il faut s'endetter et/ou créer de la monnaie pour pousser la consommation, je risque de tiquer. Keynes n'a pas beaucoup de succès auprès des libéraux ;)
Pour le plan Paulson, l'État américain a je pense des moyens plus efficaces pour tenter d'éteindre l'incendie qu'il a allumé. La solution évoquée par Vincent, la titrisation "forcée" des dettes me paraît intéressante de prime abord.
Rédigé par : Mateo | jeudi 02 octobre 2008 à 23h40
@ mateo, et compléments sur BNP Paribas
mateo, vous dites: "Pour le point 3, je ne suis pas sûr de bien comprendre. Si vous dites qu'il faut s'endetter et/ou créer de la monnaie pour pousser la consommation, je risque de tiquer. Keynes n'a pas beaucoup de succès auprès des libéraux"
J'ai du mal me faire comprendre. Les entreprises ont besoin de capitaux pour fonctionner et c'est le métier de la banque de leur en fournir. Par exemple, si l'entreprise se fait payer à 60 jours par ses clients, et qu'elle ne dispose en fond de roulement que de 20 jours, sa banque lui finance les 40 jours qui manquent en escomptant ses traites ou en lui achetant une partie de ses créances client (mobilisation de facture). Si un particulier a besoin de changer de voiture et qu'il ne possède qu'une partie du prix à payer, la Banque lui fait un prêt. Est-ce pousser à la consommation ? Il n'y a là que des transactions normales d'un entrepreneur, le banquier, qui répond aux besoins de sa clientèle. Le banquier n'a pas à pousser à la consommation, mais doit simplement remplir son rôle économique (c'est l'un des points sur lesquels il faudrait un peu plus de vigilance de la part des clients et des actionnaires des banques. Financer le contenu de caddies de supermarchés me parait fou !).
Où avez-vous vu que je faisais référence à Keynes ? Le keynésianisme est un modèle économique largement réfuté par l'évolution moderne. Keynes, entre autres, prone le déficit budgétaire délibéré de l'Etat pour relancer l'économie par l'investissement public. Ce modèle a peut-être fonctionné dans les économies protectionnistes et fermées d'avant guerre (on ne le saura jamais, la 2ème guerre ayant changé complétement le cours de tous les processus économiques). Une telle méthode de nos jours consisterait à jeter l'argent par les fenêtres, car l'effet de l'investissement à découvert de l'Etat se dilue dans l'économie du monde entier et ne produit qu'un effet imperceptible dans le pays dont l'Etat pratique ces méthodes.
Par contre, la création de monnaie par les banques est quelques chose qui va de soi. Voulez-vous qu'elle soit le monopole des seules banques centrales ? C'était le cas dans l'ancienne URSS. Même les communistes chinois ont abandonné ce système. Il est sain au contraire que la création monétaire soit répartie entre de multiples établissements financiers en concurrence.
Je rebondis sur la BNP, car à la réflexion je crains que le rapprochement que j'ai fait entre les dettes de ce groupe financier et ses fonds propres ne mène à des conclusions erronnées. Aux 1761 milliards de dettes, répondent 1817 milliards d'actifs. Cela signifie que la BNP Paribas a un nombre considérable de clients, et qu'elle est avant tout le gestionnaire de la fortune de ses clients. Ses clients se prêtent mutuellement de l'argent sans en avoir vraiment conscience. Si l'éducation économique des peuples était mieux faite, on n'aurait pas toutes les incompréhensions et les peurs actuelles. Par contre, certaines banques devraient alors cesser de faire du casino avec le pognon des clients.
Quand je dis que l'Etat français n'a pas la dimension voulue pour garantir l'argent des clients des banques de cette taille, c'est parce qu'il ne s'agit plus de banques françaises, mais de banques mondiales, que la maîtrise du système ne peut se faire que dans un cadre largement international, et qu'elle ne dépend pas non plus des seuls gouvernements, mais de tous les acteurs économiques. La BNP ne fera pas faillite, parce que ses clients ne feront pas faillite, si elle les a bien choisis. Tout est là ! Lorsque les banquiers font leur métier correctement, il ne peut pas y avoir de problème, car la loi des grands nombres fait que les faillites de clients représentent un pourcentage faible, et qu'il est largement couvert par les intérêts que prélève la banque (c'est l'une des raisons qui expliquent que les taux d'intérêts des banques montent lorsque l'économie devient moins sure, car elles prennent des marges plus importantes sur le taux de base fixé par leurs banques centrales. Elles ont d'ailleurs besoin d'augmenter ces taux également parce qu'elles doivent sélectionner plus sévèrement leurs risques et donc prêter moins).
Rédigé par : michel | vendredi 03 octobre 2008 à 05h54
@Michel,
Merci pour toutes ces précisions données avec courtoisie qui plus est ce qui est suffisament rare sur internet pour être souligné.
Je regarderais tout ça quand j'aurai plus de temps.
Cordialement,
Rédigé par : Le Champ Libre | vendredi 03 octobre 2008 à 09h51
@ Michel
Au temps pour moi, j'avais effectivement mal interprété vos propos.
Content de constater que vous partagez les critiques libérales sur le keynesianisme. Je crois qu'il n'y a plus que les politiques pour y croire encore (heureusement pas dans tous les pays), mais c'est normal: Keynes leur offre sur un plateau une justification de leur existence.
Et bien sûr, je suis absolument contre le fait d'accorder quelque monopole que ce soit aux banques centrales, dont je dénonce par ailleurs l'existence même.
Je suis donc d'accord avec vous sur la grande majorité de vos arguments. Par contre l'analyse de Rothbard sur le "permis de vol" accordé au banques me paraît intéressante de part la grande stabilité qu'elle serait je pense susceptible d'apporter. Mais je ne sais si son application serait un frein ou non à l'investissement réel. J'ai juste intuitivement l'impression que non, mais je peux en être certain étant très loin d'être spécialiste des questins monétaires.
Rédigé par : Mateo | mardi 07 octobre 2008 à 22h41
Il fallait lire "je NE peux en être certain", bien sûr…
Rédigé par : Mateo | mardi 07 octobre 2008 à 22h46
Il y a pas mal de choses qui me gênent dans l'analyse rothbardienne. D'abord, pourquoi un étalon "OR", alors que nous avons perdu le rapport du prix des choses au métal précieux, serait il encore perçu comme la juste référence du prix des choses demain ?
Plus ennuyeux, la théorie Rothbardienne suppose que lorsque la quantité de biens produits (forte croissance) augmente plus vite que la quantité d'Or, les prix s'ajustent naturellement à la baisse. Or, les ajustements à la baisse sont toujours difficiles à obtenir, parce que l'homme résiste à la baisse des salaires, le propriétaire met plusieurs mois à admettre que sa maison ne vaut pas 500 000 euros mais seulement 350 000, et ainsi de suite. En période de forte tension innovatrice, l'étalon or ne serait il pas une source d'étranglement du financement de la croissance ?
Ceci dit, le système actuel est clairement en train de collapser. la critique est aisée mais l'art est difficile, je n'ai donc pas de solution concrète aà suggérer...
Rédigé par : vincent | mardi 07 octobre 2008 à 23h01
Dans l'analyse de Rothbard, les monnaies basées sur l'or se verraient imposées, non pas par décision politique, mais par le marché, car il présume que ce serait vers ces monnaies les plus stables que se tourneraient les individus.
Il est clair que les ajustements à la baisse seraient difficiles à obtenir aujourd'hui. Mais n'est-ce pas là un fait uniquement culturel, baignés que nous sommes dans une économie où la déflation est inconnue?
Personnellement, une des choses qui me gênent avec les monnaies basées sur les métaux précieux est le coût (en temps, en ressources, en efforts etc.) inhérent à leur extraction. Si je me souviens bien, pour Rothbard cette difficulté est un avantage.
A l'époque de la dématérialisation et de l'information généralisées, un tel gaspillage me paraîtrait dommage.
Et pour ceux qui aiment pousser la réflexion plus loin quitte à tomber dans l'utopie, le système de "crédit social" décrit par Jesrad est intéressant: décentralisation à l'extrême, purement informationnel, sans coût "d'extraction" etc.
http://jesrad.wordpress.com/2006/12/08/quest-ce-que-le-credit-social/
Rédigé par : Mateo | mardi 07 octobre 2008 à 23h24
@ mateo, vincent, etc.
L'étalon or proné par Rothbart était aussi un dada de de Gaulle (probablement chez ce dernier, plus par souci d'emm...er les américains et leur "dollar gold exchange"!). Je crois qu'il faut aller au dela des représentations intuitives que nous avons de la monnaie. Nous avons du mal à appréhender les choses abstraites, et encore plus les choses virtuelles. L'or, les beaux billets de banque ne sont pas de la monnaie. Ce sont des représentations matérielles de la monnaie, un peu comme la colombe représente la paix et cupidon l'amour.
Lorsqu'un entrepreneur qui a vendu un produit, par exemple un fauteuil à un client,1000 €, qu'il tire une traite à 60 jours sur ce client, et qu'il va aussitôt l'escompter chez son banquier, celui-ci lui donne en échange, disons 990 €, en créditant d'autant le compte courant de l'entrepreneur. Il s'agit bien d'une création monétaire de 990 €. Le banquier, bien sur, ne va pas puiser dans les comptes de ses autres clients pour payer l'entrepreneur.
Bien entendu, la comptabilité du banquier reste équilibrée. Au débit, il inscrit "traite à encaisser, 1000 €", et au crédit il écrit "compte-courant Machin, 990 €" et "produit financier,10€". Tout cela est régulier. Ce n'est pas du vol, Mateo. Et pourtant, il y a eu création de monnaie. Mais, dans ce cas précis, la monnaie correspond à la valeur du fauteuil vendu. C'est en quelque sorte la mesure de la valeur du fauteuil.
Il est psychologiquement rassurant de rattacher la monnaie à quelque chose de palpable comme l'or. Les Africains d'antan, eux, appréciaient les cauris, petits coquillages importés des Maldives et qui servaient de menue monnaie pour les transactions courantes. Tout cela est conventionnel. L'or est un matériau somme toute d'une utilité faible, et ne prend de la valeur que par la force du mythe. Les cauris, ce n'est rien du tout.
Lorsque les quantités d'or disponibles ne suffirent plus à faire face au volume croissant des échanges commerciaux, on créa les billets de banque, en garantissant leur remboursement en or dans un premier temps, en dollars convertibles en or à partir de 1944,et on cessa toute référence à l'or en 1973. Les monnaies ont cessé d'être convertibles, point final.
Est-ce à dire que la monnaie immatérielle d'aujourd'hui n'est fondée sur rien ? non, elle est fondée sur l'ensemble des créations marchandes de matières premières, de produits fabriqués, de services. Elle constitue un instrument commode pour valoriser sur une base unique une infinité de biens de toutes natures.
Remarquez bien que dans l'exemple de création monétaire que je vous ai donné ci-dessus, la monnaie est rattachée à une production palpable, un fauteuil dont la valeur est bien de 1000 € puisqu'il a trouvé preneur à ce prix.
Il en va tout autrement lorsqu'un institut d'émission, constatant une faiblesse des établissements bancaires, vient à leur secours en imprimant et en leur distribuant des billets de banque. Là, il s'agit bien de génération spontanée d'argent, de création monétaire opportuniste et sans cause réelle ni sérieuse. Cela s'apparente à la mauvaise habitude qu'avaient les princes batteurs de monnaie du moyen âge de rogner les pièces d'or ou d'accroître la quantité de cuivre dans les alliages d'or de leurs écus.
C'est ce qui se produit à très grande échelle aujourd'hui. Les banques sont fragilisées par une crise de confiance qui pousse certains de leurs clients à stocker leur argent dans des coffres, ou à acheter des lingots d'or, du pétrole, des tableaux de maîtres, dont les cours surévalués s'effonfreront un jour. Ce faisant, cette création monétaire "gratuite" vient s'ajouter à l'argent existant stocké dans des coffres et qui en sortira bien un jour pour être recyclé dans l'économie, ou à celui stocké dans des surévaluations de métaux précieux et autres matières premières. On voit bien que le système conduit à un prochain excès de liquidités qui causera une sérieuse inflation, qui sera encore accrue par la récession et le chômage dont l'effet sera de baisser les volumes de production de biens marchands, et donc l'offre de produits.
Mais voyez-vous, or ou pas or, ces mécanismes pervers existent et ont toujours existé, même à l'époque où les seules monnaies existantes étaient les pièces d'or et d'argent. La solution réside moins dans une nième réforme monétaire que dans l'obligation stricte faite aux banques, instituts d'émission compris, de se conformer strictement à des principes de contreparties réelles de leurs créations de monnaie fiduciaire et scripturale, dans une transparence de leur gestion qui informe parfaitement leurs clients et partenaires, gage de confiance, et dans l'abandon de produits financiers farfelus tels que warrants, futures, crédits carbone, etc...
Rédigé par : michel | mercredi 08 octobre 2008 à 09h16