Les nouveaux dealers passent à l'attaque !
La crise actuelle a fait revenir à la mode les économistes néo-keynesiens et suscite une demande politique irrationnelle en faveur de nouvelles interventions de l'état "en faveur de" tel ou tel groupe de pression.
Pour appuyer ces demandes, le terme de New Deal revient sans cesse sur le devant de la scène médiatique. Entre le président de la CGPME qui voudrait un New Deal pour les PME, et Daniel Cohn-Bendit ou l'ONU, par la voix du très médiocre Ban Ki moon, qui appellent à un "New Deal écologique", en passant par le chroniqueur de BFM et président d'Euroland Finance Marc Fiorentino qui réclame un "New deal Européen", tel autre qui veut le New Deal de la Fibre optique... Les New Dealers passent à l'attaque !
Je deales, tu deales...
Ah, le new deal... La main vertueuse de l'état, incarnée par le preux (et démocrate, cela ne gâte rien) Franklin Delano Roosevelt, FDR pour les intimes, main salvatrice venue guérir l'Amérique des errements d'un capitalisme devenu fou dans les années 20, suite à une politique, comment dit on, déjà ? Ah oui, "ultra-libérale" conduite par ses prédécesseurs...
Cela ne vous rappelle rien ? Mais oui, bien sûr, c'est exactement la même soupe qui nous est resservie à 80 ans d'intervalle.
Pures billevesées ! Car pas plus que la crise actuelle n'est une crise d'un "ultra libéralisme" qui n'existe guère que dans les fantasmes des gauchistes et les calculs des politiciens dirigistes, la crise de 29 ne fut celle du capitalisme sauvage, moins que jamais, la gestion de la crise par Herbert Hoover fut libérale, et surtout, les politiques de Roosevelt, loin de résoudre les problèmes issus du Krach de 1929, les ont au contraire prolongés.
Sources non-conformistes
Plusieurs livres ont tenté de déconstruire l'image idyllique du New Deal bâtie par les interventionnistes au lendemains de la guerre, profitant de ce que Roosevelt soit devenu une icône intouchable juste après son décès avant la fin de la guerre, dont il était considéré comme le grand triomphateur et libérateur, à juste titre.
Digression : Je reconnais d'ailleurs bien volontiers à Roosevelt un rôle politique plus qu'essentiel dans le sauvetage des démocraties européennes occidentales entre 1940 et 1945, dont je suis un bénéficiaire très direct, ayant eu la chance de ne pas naître en Europe Orientale. Rien que pour cela, je ne prétends pas déboulonner totalement l'icône FDR, malgré toutes les turpitudes que de nombreux ouvrages ont révélé à son sujet. Mais ce n'est pas une raison pour ne pas tenter de rétablir un peu de vérité dans l'océan de désinformation qui nous est servi aujourd'hui autour de New Deal, pas vrai ?
Parmi les ouvrages recommandables, je n'ai pas lu le récent "The Forgotten Man" d'Amity Schlaes, dont l'auteur, chroniqueuse économique pour Bloomberg TV, fait partie de ceux qui avaient averti en 2005 que le système Fannie Mae courrait à sa perte. Les critiques sur amazon (US) sont excellentes.
D'autres excellents livres existent sur le New Deal. Le très classique "America's great depression" de Murray Rothbard est excellent, et disponible gratuitement en PDF depuis le site des flamands de WorkForAll, un des tous meilleurs think tanks européens, et je pèse mes mots. C'est clair, bien écrit et facile à comprendre malgré une tenue intellectuelle de haut niveau.
Mais si le seul nom de Rothbard, l'idole des anar-caps, vous fait fuir, Schlaes propose d'autres livres sur la page de garde de son site web. L'un d'entre eux, le très technique "New Deal policies and the persistence of great depression", publié en 2001 par Cole et Ohanian, économistes à la FED de Minneapolis, a le bon goût d'être disponible gratuitement sur le site de l'université de Yale. Sa conclusion: "le new deal a prolongé la crise de 7 ans". Très intéressant pour un économiste, je dirais même indispensable pour tout travail de recherche approfondi, mais honnêtement pas très vulgarisateur. Mais vous pouvez vous contenter de ce communiqué de présentation en une seule page... Plus superficielle, hélas.
Mais si vous recherchez un document synthétique, facile à lire, gratuit, et limité à 15 pages, je vous aiguillerais sans hésitation sur l'étude de Lawrence Reed, économiste et président du MacKinnac Center, téléchargeable en PDF ou lisible en ligne.
Le journal de la crise de 1929 et du New Deal
Pour ceux que l'anglais rebute, je vous en ai fait un très rapide résumé :
La FED, nouvelle banque centrale, déjà mal inspirée !
En 1913, l'état US met fin au système de monnaie privée qui prévalait jusque là dans de nombreux états de l'union, afin de pouvoir financer par la planche à billets les déficits d'une guerre mondiale qui s'avérait inévitable, et parce que le conflit rendait impossible les transferts d'or de banque à banque. Le lien des monnaies à l'or n'est pas rompu, mais il est distendu. Dès cette époque, les économistes autrichiens, au premier rang desquels Ludwig Von Mises, prédisent que le nouveau système sera instable.
Après guerre, la FED manque de maitrise de son nouveau jouet, et augmente trop vite les émissions de dollars, par une politique de taux faibles, pour "soutenir l'expansion économique" des "roaring twenties". Il en résulte une "bulle d'actifs", laquelle oriente l'argent trop facilement gagné, entre autres, sur les marchés d'actions, en plein boom.
(je reviendrai un jour prochain sur le problème des bulles, et des politiques "bullaires" - Le mystère de la localisation des bulles -- Pourquoi celle ci s'est produite sur les actions, celle là sur les dotcom, les fonds asiatiques, ou l'immobilier ? --- reste pour moi entier...)L'expansion monétaire provoque des craintes inflationnistes: en 1928, la FED décide d'opérer une vaste contraction monétaire qui aboutira à la disparition sur 3 ans de près du quart de la monnaie en circulation. Un tel rationnement conduit à la pénurie, dont le krach d'octobre 29 ne fut que la première manifestation, mais pas la cause. Il faut d'ailleurs noter que le PER (Price on earnings ratio) de la bourse avant le Jeudi noir était de 19, ce qui est élevé dans l'absolu, mais pas explosif.
A ce stade, vous noterez donc que ce sont des décisions d'état, et un monopole octroyé par l'état à une institution qui n'a de privé que l'apparence, qui ont créé les conditions initiales favorables au déclenchement de la crise.
Une bombe protectionniste
L'événement qui met le feu aux poudres est l'entrée en discussion d'une loi protectionniste, le smoot hawley act, qui fait anticiper aux acteurs de marché une contraction du commerce mondial, provoquant les premières hésitations de la bourse puis la panique boursière que l'on sait. Mais si ce n'était pas cette loi qui avait donné le signal de la fin de partie, ç'aurait été autre chose: les bulles finissent toujours par éclater, peu importe le signal déclencheur.
La loi sera finalement votée en 1930. Elle prévoit une augmentation des droits de douane sur plus de 3000 produits. En représailles, de nombreux pays adoptent des lois similaires. Les volumes d'échange sur les produits considérés sont massacrés. L'agriculture US, ou les constructeurs automobile, perdent tous leurs débouchés à l'export. Les surplus agricoles invendus provoquent une chute des prix des deux tiers, poussant des milliers d'agriculteurs à la faillite. La production automobile est divisée par 4 entre 1929 et 1932.
Un socialiste nommé Herbert Hoover
Rien que la promotion de la loi Smoot-Hawley devrait faire taire le mythe d'un président Hoover "libéral", adepte du laissez faire.
Mais il y eut pire.
Inquiet de la perspective de voir les salaires baisser, puisque les entreprises ne pouvaient payer, Hoover convoqua une conférence entre syndicats et patronats, qui aboutit à limiter autoritairement les baisses de salaire bien en dessous de celles enregistrées par les prix. cela entraîna un renchérissement de la main d'oeuvre qui aboutit à pousser hors du marché du travail des quantités d'employés.
Ce n'est pas fini.
Hoover augmenta considérablement les dépenses de l'état fédéral, de 16 à 21% du PIB, et distribua des "aides" et "soutiens" à qui mieux mieux. Pour ce faire, il multiplia les nouvelles taxes. Même les chèques furent taxés, ce qui eut pour effet de restreindre les opérations financières.
Désolé, je n'en ai pas encore fini avec Hoover, le soi disant héraut du capitalisme triomphant, selon l'imaginaire keynesien. Non content d'avoir endossé la politique de stop and go monétaire de la FED, d'avoir promu des lois protectionnistes, d'avoir augmenté de près d'un tiers le poids de l'état dans l'économie, et d'avoir augmenté de nombreuses taxes, il commit en 1932 l'erreur tragique d'augmenter le taux marginal d'imposition de 24% à 63% !! Plus personne n'était incité à prendre des risques et à créer de nouvelles richesses, à ce compte là.
Résultat, le taux de chômage passa de 3% en 1928 à 25% en 1933... Et encore, nombre de salariés touchaient leurs salaires très en retard. Les collectivités locales, entre autres, ne pouvaient plus payer leurs personnels.
Et Roosevelt dans tout ça ? Un candidat plutôt libéral...
Notons que pendant la campagne présidentielle de 1932, Roosevelt fit campagne contre l'interventionnisme débridé de Hoover, condamnant les dépenses "imprudentes et extravagantes", et accusant le président de mener les USA sur la voie du socialisme ! Et il avait raison.
Roosevelt promit une réduction des impôts, une réduction des dépenses publiques de 25%, un budget fédéral en équilibre, une monnaie "solidement basée sur l'or" pour éviter toute manipulation... Pas du Ron Paul dans le texte, mais pas si loin. Il promit de faire cesser de nombreuses interventions gouvernementales.
Il fut élu par 472 grands électeurs à 59 contre Hoover. Jamais sans doute un président nouvellement élu n'avait suscité autant d'espoirs à son arrivée.
... Un président élu ultra socialiste
Pourtant, dès son intronisation, il décida de faire tout l'inverse de ce qu'il avait promis, provoquant la démission de plusieurs de ses conseillers parmi les plus compétents, qui l'avaient soutenu pendant la campagne.
La liste des actions contre productives de Roosevelt est impressionnante.Les tranches marginales d'imposition furent augmentées à 90%. Roosevelt essaya même de les porter à 99%, mais se heurta finalement au congrès. Il démonétisa totalement l'or, interdit les transactions en métal, et ordonna que le prix de l'or soit fixé par l'état.
Face à la recrudescence des faillites bancaires, il fit d'abord fermer les banques, ce qui provoqua une panique des épargnants, et 2000 faillites de banques supplémentaires.
Les dépenses budgétaires, que FDR avait promis de réduire de 25%, augmentèrent de 83% entre 1933 et 1936. La dette fédéral augmenta de 73%. Il imposa un salaire minimal qui eut pour effet de sortir plus encore les plus démunis du marché du travail.
Il fit promouvoir le Glass Steagall act, qui interdit aux banques de diversifier leurs activités. Alors que les banques canadiennes, diversifiées et pouvant opérer dans toutes les provinces de la fédération, résistèrent à cette période (rigoureusement aucune ne fit faillite), plusieurs milliers de banques US tombèrent.
L'industrie en coupe réglée...
Il créa une bureaucratie chargée de superviser une mise sous tutelle de l'industrie, par une loi appelée National Industry Recovery Act, votée en juin 1933, analysée de façon extensive par Ohanian et Cole cités plus haut. La bureaucratie en charge du NIRA, la NRA (rien à voir avec l'actuelle National Rifle association), National Recovery Administration, sorte d'organisme de cogestion des entreprises par les gouvernements et les syndicats, sous un régime de prix contrôlés, de salaires minimaux, de codes réglementaires imposés et d'embauches forcées. Le NIRA fut financé par des taxes sur les entreprises contrôlées et entraîna une augmentation des comptes de charges des d'entreprises de 40% !
Alors que l'économie avait montré des signes d'une reprise vigoureuse lors des 6 premiers mois de 1933 (hausse de l'emploi industriel de 25% !!), le NIRA allait lui donner le coup de grâce: dans les 6 mois qui suivirent sa promulgation, la production industrielle chuta de 25%. 2 millions d'entreprises et 22 millions d'employés furent concernées par le NIRA. Lawrence Reed rapporte qu'un tailleur du New Jersey fut mis en prison parce qu'il fabricait des éléments de costumes pour 35 cents alors que le code NRA prévoyait un tarif de 40 cents: et toute l'industrie était gérée de cette façon, et les méthodes des employés du NRA confinaient au Fascisme. En effet, la NRA ne pouvait éviter que se développat un important marché noir. elle eut recours à des méthodes policières musclées, fascisantes, pour faire appliquer les codes du NRA...
Cela paraît difficile à croire tant cela est en décalage avec l'histoire idyllique du New Deal que nous avons retenu de notre passage par l'école, mais toutes les sources historiques fouillées concordent: l'Amérique de Roosevelt était le siège d'un dirigisme de nature très autoritaire. L'analogie avec Mussolini, dont certains proches de Roosevelt étaient ouvertement admirateurs, n'est pas dénuée de fondement. Fort heureusement, la solidité de la constitution imaginée par les pères fondateurs de l'union permit de préserver un minimum de libertés individuelles, qui empêcha toujours un basculement vers un état pré-fascisant.
Naturellement, de nombreux bureaucrates du NRA choisirent de ne pas sévir moyennant corruption. Comme en URSS, de nombreux fonctionnaires préféraient fermer les yeux sur ces marchés parallèles et prélever une dîme au passage: la corruption a ici joué un rôle de soupape de sécurité du système pour l'empêcher de sombrer. Loin de moi l'idée de défendre la corruption, mais dans les régimes les plus sévèrement dirigés, elle est souvent le seul moyen d'acheter un peu de liberté...
Explosion de l'appareil bureaucratique
Toute l'économie fut encadrée par des bureacuraties similaires. Voici une liste non exhaustive des bureaucraties créées sous l'administration Roosevelt:
- AAA - Agricultural Adjustment Administration
- AMA - Agricultural Marketing Administration
- AOA - Administration of Operation Activities
- BCD - Bituminous Coal Division
- BCLB - Bituminous Coal Labor Board
- BEW - Board of Economic Warfare
- BIR-T - Board of Investigations and Research Transportation
- BOB - Bureau of Budget
- BPA - Bonneville Power Administration
- BWC - Board of War Communications
- CAA - Civil Aeronautics Authority
- CCC - Civilian Conservation Corps
- CCC - Commodity Credit Corporation
- CPA - Council of Personnel Administration
- CPRB - Combined Chiefs of Staff
- CEA - Commodity Exchange Administration
- CES - Committee on Economic Security
- CFB - Combined Food Board
- CMB - Combined Munitions Board
- CPRB - Combined Production and Resources Board
- CRMB - Combined Raw Materials Board
- CSAB - Combined Shipping Adjustment Board
- CWA - Civilian Works Administration
- DLC - Disaster Loan Corporation
- DPC - Defense Plant Corporation
- DSC - Defense Supplies Corporation
- EIBW - Export-Import Bank of Washington
- EHFA - Electric Home and Farm Authority
- EPCA - Emergency Price Control Act
- FCA - Farm Credit Authority
- FCC - Federal Communications Commission
- FCIC - Federal Crop Insurance Corporation
- FDIC - Federal Deposit Insurance Corporation
- FERA - Federal Emergency Relief Agency
- FFC - Foreign Funds Control
- FFMC- Federal Farm Mortgage Corporation
- FHA - Federal Housing Administration
- FIC - Federal Insurance Corporation
- FLA - Federal Loan Agency
- FNMA - Federal National Mortgage Corporation (Fannie Mae)
- FPA - Food Production Administration
- FPHA - Federal Public Housing Authority
- FRC - Facilities Review Committee
- FREB - Federal Real Estate Board
- FSA - Federal Securities Administration
- FSA - Farm Security Agency
- FSCC - Federal Surplus Commodity Corporation
- FTC- Federal Trade Commission
- FWA - Federal Works Agency
- HOLC - Home Owners Loan Corporation
- LOPM - Liaison Office for Personnel Management
- MLB - Maritime Labor Board
- MRC - Metal Reserve Company
- NBCC- National Bituminous Coal Commission
- NHA - National Housing Authority
- NHPC - National Historical Publications Commission
- NIC - National Insurance Board
- NLB - National Labor Board
- NLRB - National Labor Relations Board
- NMB - National Mediation Board
- NPPC - National Power Policy Committee
- NRA - National Recovery Administration
- NRAB- National Railroad Adjustment Board
- NRB - National Resources Board
- NRC- National resources Committe
- NRPB - National Resources Planning Board
- NWLB - National War Labor Board
- NYA - National Youth Administration
- OBCCC - Office of Bituminous Coal Consumers Council
- OC - Office of Censorship
- OCD - Office of Civilian Defense
- OCIAA - Office of Coordinator of Inter-American Affairs
- ODHWS - Office of Defense and Health and Welfare Services
- ODT - Office of Defense Transportation
- OEM - Office of Emergency Management
- OES - Office of Economic Stabilization
- OLLA - Office of Lend-Lease Administration
- OPA - Office of Price Administration
- OPCW - Office of Petroleum Coordinator for War
- OSRD - Office of Scientific Research and Development
- OWI - Office of War Information
- PAW - Petroleum Administration for War
- PCD - Petroleum Conservation Division
- PIWC - Petroleum Industry War Council
- PRA - Public Roads Administration
- PRP - Production Requirements Plan
- PRRA - Puerto Rico Reconstruction Administration
- PWA - Public Works Association
- PWRCB - President's War Relief Control Board
- RA - Resettlement Administration
- RACC - Regional Agricultural Credit Corporation
- REA - Rural Electrification Administration
- RFC- Reconstruction Finance Corporation
- RRB - Railroad Retirement Board
- RRC - Rubber Reserve Company
- SA - Sugar Agency
- SEC - Securities and Exchange Commission
- SCS - Soil Conservation Service
- SMA - Surplus Marketing Association
- SSB - Social Security Board
- SSS - Selective Service Board
- SWPC - Small War Plants Corporation
- TNEC - Temporary National Economic Committee
- TVA - Tennessee Valley Authority
- UNRRA - United Nations Relief & Rehabilitation Administration
- USES - United States Employment Service
- USHA - United States Housing Authority
- USMC - United States Maritime Commission
- WDC - War Damage Corporation
- WEPL - War Emergency Pipe Lines, Inc.
- WMC - War Manpower Commission
- WPA - Works Progress Administration
- WPB - War Production Board
- WRA - War Relocation Authority
- WSA - War Shipping Administration
Ah, les emplois aidés...
Inutile de dire que la productivité de ces administrations fut pus que douteuse. L'un des volets les plus importants de la politique de FDR fut la politique des emplois aidés pour les grands travaux.
Deux administrations, la CWA puis la WPA, se succédèrent pour créer des emplois publics destinés à réaliser des ponts, des routes, des immeubles, mais aussi parfois à des tâches essentielles comme des troupes de théâtre, et autres... Si la mythologie populaire affirme que cette politque a permis de relancer l'économie US, il n'en est rien. Pour quelques réalisations spectaculaires (barrages, ponts, etc...) qui servirent d'exemple, mille autres projets, en fait, plus de 200 000, soit n'aboutirent jamais, ne furent pas achevés, ne servirent à rien (bridges to nowhere), ou furent l'occasion pour les bureaucrates en charge de leur achèvement, de toucher de juteuses contreparties occultes.
L'économie commença à respirer quand la cour suprême, dont FDR avait tenté de réduire les pouvoirs, déclara illégale la NRA et le NIRA, ainsi que son équivalent dans l'agriculture, l'AAA, en 1936. La cour a joué un rôle important dans cette période, constituant souvent le dernier rempart contre les atteintes répétées de l'administration Roosevelt contre les libertés individuelles.
Mais les hausses d'impôt sur les sociétés, les nouvelles instances de représentation syndicales, et quelques autres créations de l'administration Roosevelt, eurent tôt fait de stopper l'embellie toute relative. Le chômage, malgré les mesures de travail artificiellement fourni par l'état, resta supérieur à 15%, pour remonter à 18% à la veille de la guerre.
Je passe sur les détails de nombreuses autres politiques socialistes aux relents fascisants mises en place par FDR. Les relations entre syndicats, employeurs et bureaucraties tournaient souvent à la confrontation, parfois dure. Un employeur qui résistait au diktat conjoint de l'état et des syndicats risquait parfois plus que son entreprise...
Le secrétaire au trésor de FDR, un certain Henry Morgenthau, écrivit dans son journal privé que "non seulement ce gouvernement n'avait tenu aucune de ses promesses, qu'il y avait autant de chômage et plus de pauvreté qu'à leur arrivée, et que la seule évolution notable des années FDR fut celle de la dette publique qui avait explosé".
Ah, et FDR a légué à l'Amérique Fannie Mae. Le monde continue de payer, d'une certaine manière, les tragiques erreurs de FDR.
L'Amérique ne s'est pas sortie de la dépression grâce à la guerre, mais dans l'immédiat après guerre, quand Truman, prenant acte des effets pervers des politiques de FDR, en fit abolir une grande partie. Sans que les années Truman puissent être qualifiées de libéralisation outrancière de l'économie (le taux marginal d'impôt sur le revenu resta à 90% !), l'abolition de nombreux codes et la dissolution de nombreuses bureaucraties permit à l'économie US de respirer enfin.
Le come back du New Deal
Il est évident qu'aucun gouvernement de ce monde, aussi incompétent soit-il, ne commettra les mêmes erreurs avec la même amplitude que celles commises par l'administration Roosevelt (si, le gouvernement Argentin des Kirchner. Il faut bien une exception...). Quand bien même l'on peut nourrir des craintes légitimes sur ce que fera le probable futur président des USA, l'on voit difficilement un président imposer une sorte d'état pré-mussolinien en 2009 aux USA, même avec une probable majorité très à gauche au congrès.
Mais force est de reconnaître que certaines mesures annoncées ici et là ont de forts relents des années 30 qui ne laissent pas d'inquiéter... Sur notre bon vieux continent, des thèmes tels que "l'Europe qui protège", "l'état garant des emprunts bancaires", "la relance", "un fond souverain européen", "investissements stratégiques", "emplois aidés"... Les gens qui soutiennent de telles interventions devraient peut être se faire offrir le livre de Mme Schlaes pour Noël.
Tout ceci évoque une mainmise accrue de l'état sur nos économies, alors que les entreprises et les individus ont avant tout besoin de liberté et de capital pour se sortir d'une situation de crise. L'avenir parait bien sombre.
Que faudrait-il donc faire pour surmonter la crise ? Cela fera l'objet d'autres articles. En attendant, une piste: étudiez le programme de Franklin D. Roosevelt quand il n'était que candidat !
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Vincent, vous me stupéfiez ! Hier soir, vous étiez à Paris et vous vous montriez éblouissant dans un débat radiodiffusé de plus d'une heure, faisant la preuve d'une très solide expertise économique, d'une grande culture politique, d'une capacité de conviction étonnante. J'étais sous le charme. Et ce matin, au petit déjeuner, vous nous servez ce caviar d'article, faisant voler en éclat l'un des mythes le plus ancrés dans la culture universelle et dans l'inconscient collectif occidental ! Vous êtes l'homme prothée du libéralisme, cette espèce aujourd'hui menacée.
Iconoclaste prodige, je vous souhaite un succès à la hauteur de votre talent! Brisez les idoles, martelez la vérité, foulez aux pieds le politiquement correct. L'avenir vous appartient, les français ont besoin de vous, l'Europe aussi.
Rédigé par : michel | mercredi 29 octobre 2008 à 10h37
Post scriptum - Merci à FD Roosevelt et aux américains d'avoir sauvé l'Europe de 1941 à 1945. Mais si Roosevelt était intervenu dès 1939-40, comme c'était l'intérêt supérieur de la Nation américaine, quitte à sacrifier sa troisième réélection,-risque qu'un grand homme doit savoir prendre-, Il aurait épargné aux familles de son pays et au monde bien des larmes et des souffrances.
Oui merci Roosevelt, même si ce n'est pas l'amour de la France qui vous a fait intervenir plus tard, car vous n'avez jamais caché votre mépris pour notre peuple, qui pourtant a bien contribué à l'indépendance du votre.
Rédigé par : michel | mercredi 29 octobre 2008 à 10h50
Merci Vincent pour ce nouvel éclairage.
Au fait, le programme d'Obama ne ressemble pas beaucoup à celui du candidat Roosevelt. Espérons que lui aussi fasse totalement l'inverse de ce qu'il a promis... :)
Rédigé par : Landry | mercredi 29 octobre 2008 à 10h51
Bonne idée d'attaquer le mythe de 1929. J'avais fait ma propre chronique des évènements de 1925-1933 ici ( http://jesrad.wordpress.com/2008/09/17/1929-annee-de-vaches-mortes/ ), dont il ressort que les véritables coupables de la crise de 29 étaient Herbert Hoover, JP Morgan et Benjamin Strong. Roosevelt a surtout été l'opportuniste démago qui a profité des circonstances. J'en suis même arrivé à conclure que la crise de 1929 s'est fini en 1933, et que la Dépression de 1935-1946 était simplement le contrecoup des interventions respectives d'Hoover et Roosevelt.
"Le mystère de la localisation des bulles -- Pourquoi celle ci s'est produite sur les actions, celle là sur les dotcom, les fonds asiatiques, ou l'immobilier ? --- reste pour moi entier...)"
J'ai une explication à vous proposer !
La politique monétaire de la FED, à l'époque, passait principalement par sa branche directrice de New York, dirigée par George Harrison. C'est ce type qui a le plus poussé à l'inflation monétaire avant comme après 1928. Donc il y avait une certaine localisation de l'excédent monétaire sur New York (excédent qui se diffuse dans l'économie comme une vague de mascaret: banque centrale, puis banques, puis investisseurs puis entreprises et commerces, puis grand public). Par ailleurs la bourse de New York était la place de marché la plus efficace, au fonctionnement fluide, donc elle a donné la première les signaux nécessaires au renforcement (feedback positif) du mouvement spéculatif. C'est ce qui explique que les fonds sont allés en priorité là-dedans. On retrouve le même type d'explication pour la "tulipe-mania" en Hollande: localisation initiale de l'excédent monétaire et marché "bien lubrifié" captant cet excédent ( http://jesrad.wordpress.com/2008/10/27/la-tulipe-mania-hollandaise-du-xviieme-siecle/ ).
Autre chose: l'effondrement de la bourse en Octobre 1929 ne fut pas le premier signe de la crise, mais le second. En effet le premier signe fut le ralentissement de la consommation au mois de Juillet, consécutif à l'arrêt du mal-investissement fin 1928.
Rédigé par : Jesrad | mercredi 29 octobre 2008 à 11h01
Merci Vincent pour cet excellent billet --un de plus !
Intéressante coïncidence, j'ai moi-même publié hier un passage d'interview de Milton Friedman, au cours duquel ce dernier discernait entre deux séries de mesures relatives au New Deal, et déclarait avoir soutenu l'une des deux : http://blog.sfadj.com/2008/10/le-court-terme-mritait-de-prvaloir.html
Qu'en penses-tu ?
Rédigé par : Rubin | mercredi 29 octobre 2008 à 13h07
Bonsoir,
Si je peux me permettre d'ajouter quelques éléments à autant d'érudition, il y a la remarque d'Alfred Sauvy dans l'Economie du diable à propos de FDR qui indique que ce dernier, en généralisant la semaine de 40 h, a coupé les ailes à la reprise qui s'annonçait. Toujours l'idée de Sauvy que le travail se multiplie, et ne se divise pas, quitte à ce que cela signifie d'abord plus d'horaire au départ.
D'autre part, vous pouvez lire le livre de Philip Selznick, TVA and the Grass Root, qui montre - et démonte - la belle mécanique planiste. L'auteur rappelle notamment tous les arrangements qu'ont du faire les fonctionnaires de Washington envoyés sur place avec les autorités locales et les entreprises du cru.
Dernière question: où pensez vous pouvoir trouver le programme de FDR de 1932 ?
Rédigé par : Tonton Jack | mercredi 29 octobre 2008 à 17h15
@ Michel: rien de stupéfiant. Juste que l'article a été écrit à la fin de la semaine dernière, après un mois de recherches et de lectures.
Ensuite, pour ne pas interférer avec l'émission sur RC, j'ai programmé la mise en ligne automatique pour hier soir minuit une, puis, comme je devais rectifier la note sur mon passage sur RC, je l'ai en catastrophe décalée à 8h20.
Voila voila. & merci pour vos encouragements.
@ Tonton jack: merci pour ces très intéressantes références dont je vais essayer de tirer profit.
@ autres: je suis attendu en ville mais je ne vous oublie pas. A plus tard !
Rédigé par : vincent | mercredi 29 octobre 2008 à 20h03
c'est quoi "le taux marginal d'impôt sur le revenu"???? quelqu'un peux m'expliquer???
merci
Rédigé par : mica | jeudi 30 octobre 2008 à 23h20
@ mica: dans le texte présent, c'est le taux appliqué à la tranche la plus élevée des revenus.
Si un impot est découpé en 4 tranches d'imposition de 10%, 20%, 30% et 40%, on dira que son taux marginal est de 40% : une personne assez riche pour être taxée dans la dernière tranche verra chaque nouvel euro gagné taxé à 40%.
dans la vraie vie, c'est pas si simple: niches fiscales, exonérations, cumuls, déductions... Mais le principe est là.
Rédigé par : vincent | jeudi 30 octobre 2008 à 23h40
merci!!!
Rédigé par : mica | vendredi 31 octobre 2008 à 18h58
@ Rubin: Au dela de la stricte efficacité économique, il est certain qu'il faut prendre en compte les coûts d'un maintien difficile de l'ordre public si trop de personnes se retrouvent d'un seul coup désespérées: oui, ça peut "justifier" des mesures d'urgence. Ou en tout cas les expliquer. Peut être est-ce cela que M.Friedman avait en tête lorsqu'il disait cela.
Mais l'histoire montre que la plupart des mesures prises dans l'urgence sont comme un shoot d'héroïne pour un junkie: ça calme la douleur d'abord, ça détruit à petit feu ensuite.
Le mieux est de ne pas commencer à s'exposer aux risques par des politiques adéquates dans les temps tranquilles... mais une fois que les conneries sont faites, il se peut qu'une intervention d'urgence de l'état soit nécessaire (démagogie pour maintenir l'ordre public, pudiquement appelé "cohésion sociale"), à condition que ce soit pour se dégager de toute intervention ensuite. Or, actuellement, ce n'est pas ce que l'on observe. d'où mes inquiétudes...
Rédigé par : vincent | samedi 01 novembre 2008 à 19h36
Presque tout les hommes politiques qui font campagne sur le thème de faire reculer la fiscalité et la règlementation se transforment en interventionnistes une fois au pouvoir. C'est au point qu'il ne semble y a avoir aucun remède contre ça.
Je suppose que c'est du aux promesses faites à trop de groupes de pression pendant la campagne.
Rédigé par : Nick de Cusa | lundi 10 novembre 2008 à 15h55
à charge de Hoover
Ne pas oublier LE premier des grands travaux et symbole de cette époque.
(même si le chantier proprement dit commença juste avant le crack et le projet entamé en 1922)
le HOOVER dam
http://fr.wikipedia.org/wiki/Barrage_Hoover
Rédigé par : L'ami du laissez-faire | lundi 10 novembre 2008 à 22h59
Comment peut-on renflouer les banques, l'industrie automobile entre autre si l'on ne cesse de diminuer l'impot, seul véritable source de revenu pour l'état ?
Rédigé par : herve | vendredi 12 décembre 2008 à 14h29
Cet article propose grosso-modo trois idées principales.
1- Les sources à l'origine de la crise de 1929 ne sont pas l'ultra-libéralisme, mais au contraire ce sont les mesures "socialistes" de Hoover.
2- Même en étant considéré comme libéral, les politiques menées sur le terrain par Roosevelt étaient plutôt"socialistes".
3- Ce ne sont pas ces politiques "socialistes" qui ont permit la sortie de la crise mais au contraire elles l'ont prolongées.
Toutefois, vous n'avez pas été très claire quant aux causes réelles qui étaient à l'origine de cette crise, et encore moins sur les vraies origines de la crise financière(puis économique) actuelle. Les faits sont là, c'est bien des politiques libérales qui sont pratiquées aux US néanmoins en ce qui concerne le secteur financier. Ca on ne peut pas le nier, l'autorégulation du marché ne fonctionne plus, elle a montré ses limites.
Je ne suis pas en train de dire que le remède réside dans la prise de mesures d'inspiration socialiste, mais en tout état de cause le marché laissé à lui même à montré qu'il n'est pas en mesure de sauvegarder l'état d'équilibre, de le maintenir, ou du moins de revenir tout seul à cet état après une crise.
Rédigé par : Anouar ELAZHARI | dimanche 14 décembre 2008 à 18h17
@ Anouar
Sur les origines de la crise actuelle, je vous suggère mon "dossier subprimes", et j'y suis formel: c'est l'interventionnisme de l'état US qui a causé cette crise. L'article en anglais "the big picture" procure le meilleur résumé.
d'autre part, je ne vois pas ce que vous entendez, parlant de FDR, par "même en étant considéré comme libéral". Et ses politiques n'étaient pas "plutot socialistes" mais "très socialistes".
Rédigé par : vincent | dimanche 14 décembre 2008 à 20h41
@ Anouar
Pour schématiser grossièrement, l'origine première de la crise de 1929 est la "nationalisation" de la monnaie, avec la création du système de banque centrale, causant une période "d'argent facile", comme la crise actuelle.
Voir la théorie dite "autrichienne" des cycles.
Tu peux par exemple lire l'article de Jesrad, dans un style qui est lui est propre: http://jesrad.wordpress.com/2008/09/17/1929-annee-de-vaches-mortes/
Le système de banque centrale, c'est le socialisme appliqué au système bancaire et monétaire.
Rédigé par : Mateo | dimanche 14 décembre 2008 à 21h49
bonjour
je viens de decouvrir les commentaire sur la crise de 33
je pense qu on est entrain de la refaire
cer n est pas encourageant
cordialement
m
Rédigé par : gilloteaux | jeudi 02 avril 2009 à 10h28