Mais plutôt que de foncer sur ces sujets relativement médiatisés, je m'aventure sans plus tarder dans les eaux boueuses de l'économie d'outre Atlantique, dont la presse que l'on dit grande vous a beaucoup moins parlé que de la comptabilité publique de la Grèce ou que des JO de Vancouver, mais qui n'en reste pas moins, à mon avis, l'épicentre de fortes secousses mondiales à venir. La Chine et l'Europe viendront plus tard.
Immobilier US: le pire est encore DEVANT les banques ?Par où commencer ? Le problème des banques américaines (longuement exposé dans ce blog) vient de ce qu'elles ont trop prêté à des ménages en pariant non pas sur leur capacité à s'inscrire dans une chaîne de création de valeur capable de leur assurer un revenu compatible avec le paiement du crédit, mais en pariant sur une valeur toujours montante de l'immobilier acheté avec le crédit.
D'autres ménages qui avaient déjà payé partiellement leur maison se sont remis en situation de sur-endettement en "profitant" de la bulle pour s'engager dans du crédit "rechargeable" basé sur la valeur supposée de leur bien immobilier pour consommer plus de cuisines en granit ou de SUV. Ces crédits sont généralement référés sous le vocable HELOC, home equity line of credit, dans les comptes des banques.La somme des crédits purement immobiliers et HELOC a atteint environ 12 000 milliards de dollars à son apogée, dont environ 1500 ont été reconnus comme en faillite, donc passés par pertes et profits par les banques, et encore beaucoup vont subir le même sort. Sur la base des travaux de Wendell Cox, j'ai déjà cité le chiffre de 4 000 milliards de pertes potentielles liées à la sur-évaluation des achats immobiliers. Aujourd'hui, certains au FMI n'hésitent plus à avancer des chiffres de pertes globales du même ordre.
La plupart des prêts US prévoient que, sous réserve du respect d'un certain formalisme, l'emprunteur qui se retrouve dans l'impossibilité de payer ses mensualités ait le choix de laisser sa maison à sa banque, laquelle devra tenter de se rembourser de l'ardoise ainsi laissée sur le produit de la revente de la maison saisie. Sauf que le marché étant en chute libre, la banque se retrouve avec une perte importante à inscrire dans ses comptes (à l'actif de son bilan), et que la somme des pertes cumulées peut lui faire perdre tellement de valeur que son actif devient inférieur au montant de ses dettes: la banque est techniquement insolvable, à court, moyen ou long terme, et doit déposer le bilan.Le problème est que vu de l'acheteur, questions d'amour propre mises à part, il est très rentable de ne pas faire d'effort excessif pour rembourser sa banque, car dans un marché aussi déprimé, une famille aura intérêt à rechercher pour bien moins cher une location dans un logement équivalent ou à peine inférieur, plutôt que de rester en "valeur patrimoniale" négative, c'est à dire avec bien plus de dette à rembourser que la valeur résiduelle de la maison (cf. le schéma ci dessous, signé du talentueux C.H. Smith).
L'échec - prévisible - des politiques de subvention keynesiennes à l'immobilier
La stratégie du trio Obama-Bernanke-Geithner pour tenter d'enrayer la chute de la valeur des maisons, et donc l'encouragement des ménages en difficulté à "planter" leurs banques, a consisté à tenter de regonfler la bulle immobilière par des subventions à l'achat, et l'utilisation du stimulus pour renflouer Fannie Mae et Freddie Mac, ainsi que la mobilisation de la troisième entreprise de refinancement publique de prês immobbiliers, Ginnie Mae, pour racheter en masse des nouveaux crédits consentis dans des conditions toujours plus scabreuses à des ménages incapables de payer.
5 millions de maisons forcloses à venir ?
Peine perdue. Selon le Wall Street Journal, citant une étude Standard & Poors et J.Burns Real estate (lire également l'interview de son Vice Président, Wayne Yamano), sur 7,7 millions de prêts immobiliers aujourd'hui en retard de paiement, 1,6 devraient éviter la banqueroute, 1,1 millions sont déjà en procédure de liquidation - donc inscrits au bilan des banques-, ce qui nous laisse encore 5 millions de prêts qui seront prochainement déclarés en banqueroute, et devront être inscrits comme tels dans les comptes des banques !
En effet, alors qu'une pause d'une année dans l'application des normes comptables "mark to market" avaient permis aux banques de se donner un peu de répit pour tenter de se "refaire un bilan", le retour, depuis le 1er janvier, d'une norme comptable (FAS 167) obligeant à inscrire les pertes en temps quasi réel nous promet de beaux "profit warning" et une véritable dégringolade des résultats annoncés debut avril pour le premier trimestre 2010, d'autant plus que la hausse des marchés d'actions artificiellement entretenue par les injections d'argent gratuit dans les comptes des banques par la FED semble bel et bien terminée.
5 Millions de prêts supplémentaires en banqueroute dans les prochaines années: cela représente un "inventaire caché" de maisons à vendre aux enchères de l'ordre de 15 à 27 mois ! Ces inventaires cachés sont majoritairement concentrés dans les quatre états les plus bullaires de l'union, la Californie, la Floride, l'Arizona, le Nevada (graphe WSJ).
Autrement dit, les prix, dans ces états, n'ont pas fini leur chute. C'est ce que confirme par ailleurs le rapport "demographia" édité chaque année par Wendell Cox, qui montre que si certaines banlieues résidentielles de Californie (telles que Stockton) ou de Floride ont vu leur ratio d'accessibilité tomber en dessous de 3, les grandes villes prestigieuses et leurs communautés immédiatement voisines restent encore largement au dessus de leur norme historique d'avant bulle, avec par exemple un prix médian des maisons à San Francisco qui reste égal à 7 fois le revenu médian de la ville: Même si ce ratio était monté à 11 au plus haut de la bulle, la moyenne d'avant bulle était de l'ordre de 4-4,5... On trouve toujours à Frisco des bicoques de 75m2 proposées à 670 000$... Il faudrait être fou pour acheter maintenant !
Les banques qui ont beaucoup prêté dans ces états vont souffrir en 2010 et 2011... D'autant plus, comme je l'ai déjà dit, qu'une vague de "déclics" contractuels portant sur des prêts à taux variables (fins de périodes à taux discount) commence à déferler sur les ménages et les banques, cf. ce graphique du crédit suisse dont je ne me lasse pas - la ligne rouge s'est juste un peu déplacée...
C'est encore la Californie qui va se trouver au centre de cette vague de faillites qui a déjà commencé. La Californie a été la source de 40 à 50% des crédits à risque de type ARM et "Jumbo" (prêts non éligibles au refinancement Fannie-Freddie, pour maisons très chères, pour ménages à haut revenus). D'ores et déjà, cette dernière catégorie de prêts en difficultés représente 167 milliards dans les comptes des banques émettrices. Et ce n'est que le début.
Les tentatives de l'administration Obama pour enrayer ces vagues de faillites sont vouées à l'échec: aucun gouvernement au monde, surtout lorsqu'il est déjà surendetté, ne peut financer la "reflation" d'une telle bulle en cours d'éclatement. Le marché immobilier US n'est plus en chute, il est en totale débandade.
L'économie réelle : crédit en chute libre !
140 banques ont fait faillite aux USA en 2009 (sur plus de 8000, il y a de la marge). Sans surprise, l'année 2010 commence sur de mêmes bases avec déjà, au 20 février, 20 établissements fermés.
Je n'ai aucune raison de croire à un ralentissement du mouvement, bien au contraire. Mais au delà de ces 20 banques de plus en faillite, celles qui résistent sont obligées de réduire drastiquement l'encours de leurs engagements (en langage comptable, le "total de leur bilan"), pour ne pas se retrouver elles mêmes à court de fonds propres et donc techniquement insolvables. Aussi les banques américaines ont elles réduit leur encours de crédit à une vitesse jamais vue aux USA. Selon le Daily Telegraph, le reflux du crédit observé en Janvier correspondrait, en rythme annuel, à -16% ! Même si je crains qu'à long terme, les injections de crédit et la monétisation rampante de la dette du trésor américain par la FED ne signe le retour de l'inflation, il est évident qu'à court et moyen terme, les forces déflationnistes l'emportent très nettement sur les forces inflationnistes, et que tous les efforts de Bernanke pour empêcher la contraction du crédit n'auront servi à rien qu'à retarder l'inévitable purge par l'économie des dettes non compensées par de la capacité à créer de la valeur.
Faute d'avoir eu le courage de laisser les banques faire faillite et négocier des échanges de "dette contre capital" avec leurs créanciers pour désendetter rapidement l'économie américaine, ou d'avoir laissé des "méchants" spéculateurs comme le texan John Paulson purger le système financier de ses mauvaises dettes en rachetant à vil prix des fonds entiers de prêts pourris (Mortgage Backed Securities) pour renégocier tranquillement les termes des prêts devenus trop lourds à rembourser avec les emprunteurs, l'intervention du trésor et de la FED n'aura pas sauvé l'économie du marasme et n'aura servi qu'à retarder l'inévitable ajustement à la baisse de la pyramide de dettes basée sur du sable de l'économie américaine, tout en faisant exploser la dette du trésor, menaçant la crédibilité des USA et de sa monnaie.
Pire, l'économie réelle, qui était droguée au crédit, se retrouve asphyxiée. Comme je l'ai déjà écrit, la seule solution eut été de permettre aux entreprises de retrouver un meilleur accès au capital, en coupant dans les taxations marginales et les dépenses publiques. C'est l'inverse qui a été fait.
Le résultat ? Tout porte à croire que les nouveaux emplois créés par des jeunes entreprises au fort potentiel de croissance, celles qui pourraient absorber les liquidations de postes de travail de l'économie réelle, sont aux abonnés absents.
J'avais il y a quelques années mis le doigt sur une faille de l'appareil statistique de compte des emplois aux USA, faille rapportée à l'époque par le chroniqueur financier (très) conservateur Don Luskin.
Le Bureau of Labor Statistics (BLS) est incapable de comptabiliser en temps réel les créations d'emplois dans les start-up. Aussi les estime-t-il, et réévalue-t-il une fois par an, en Février, les créations d'emplois survenus non pas dans les douze mois précédents, ce serait trop simple, mais dans l'avant dernière année, d'avril à mars. Dans les bonnes années, il avait tendance à sous estimer le nombre de créations, mais dans les mauvaises années il les surestime. Bloomberg avait estimé, début février, à 824.000 la correction à la baisse des chiffres des créations d'emplois dans les start ups entre avril 2008 et mars 2009 qui serait annoncée le 6 février 2010. Une telle révision baissière est du jamais vu depuis les années 2000 (-0,6%, cf graphe ci dessous), et sans doute avant.
Finalement, la révision annoncée n'a été "que" de 617 000, mais la tendance est là. Rien n'indique qu'elle puisse s'être retournée entre avril 2009 et mars 2010, période pour laquelle le BLS livrera le bon chiffre royalement en février 2011 ! Il serait miraculeux que l'emploi dans les start ups ait été vigoureux ces douze derniers mois.
Car un autre indicateur de l'activité générale, l'immobilier commercial, est toujours lui aussi dans le rouge. Une commission d'enquête du Congrès a estimé les pertes potentielles des banques entre 2010 et 2014 à environ 200-300 milliards de dollars supplémentaires dans ce secteur. Or, un boom des entreprises "innovantes" tend généralement à être suivi de près par une expansion des services de proximité (intermédiaires, agences de com', etc...) consommateurs d'espace commercial et de bureaux.
Et naturellement, cela renforcera le cycle de déflation du crédit précédemment décrit. Et sans possibilité pour les entreprises de remplacer le financement par la dette par une meilleure disponibilité du capital...
Si l'on ajoute que "l'économie verte" qui devait créer des milliers d'emplois ne révèle rien d'autre qu'une bulle subventionnée elle aussi en train d'éclater, et les moteurs de croissance par l'innovation de l'économie américaine paraissent pour l'instant tourner au ralenti.
conclusion: 8 - 8 < 0L'économie américaine avait créé 8 Millions d'emplois pendant les années bullaires. Or, ces emplois n'étaient pas assis sur une vraie création de valeur mais sur une extension purement spéculative du crédit. Le résultat est que la productivité réelle de l'économie US au cours des années de bulle a, dans les faits, plutôt stagné, avec pour résultat une dégradation du pouvoir d'achat réel des ménages, et des surcapacités dans des secteurs gavés de crédit facile.
En moins de deux ans, l'économie US a déjà peu ou prou détruit l'équivalent de ces 8 millions d'emplois. Faute d'une réponse adaptée des autorités, elle en détruira encore d'autre dans les quelques années à venir. Certes, il n'est pas exclu que les grandes entreprises, qui se sont restructurées, continuent d'afficher plus ou moins des résultats corrects, alimentant les médias en messages de "reprise". Mais sur le front de l'emploi et de la croissance réelle, les 18 mois à venir risquent bien d'être particulièrement durs.
A long terme, 4-5 ans, je reste optimiste: de même que toutes les injonctions et tous les stimuli gouvernementaux ne pourront venir à bout de l'effondrement de la bulle de crédit qui s'est formée, a contrario, aucune accumulation de bêtises étatistes ne pourra empêcher l'incroyable vitalité de la R&D américaine de trouver les produits et services innovants qui sortiront le pays de son marasme. De même, face à l'impasse financière qui s'annonce tant pour les états fédérés que pour l'union elle même, je n'ai pas vraiment de souci sur la capacité américaine de parvenir à trouver les bonnes réponses, dans la douleur certes, mais d'y parvenir tout de même. Les USA ne deviendront pas un pays communiste, la société civile, sonnée mais vivante, reprendra la main sur les étatistes de tout poil, et si les USA ne doivent plus être à l'avenir le phare unique de l'économie mondiale, je ne crois pas à un scénario de chute de l'empire romain.
Dans la vieille Europe, par contre, cette capacité de rebond d'une société frappée par maints aspects de maux similaires, me parait bien moins assurée... Mais c'est une autre histoire.
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Lire également sur le même sujet:
Deux commentaires sur cette note très intéressante :
Concernant l'intérêt des ménages à jouer volontairement le jeu de la foreclosure plutôt que de se saigner aux 4 veines pour payer des mensualités énormes sur une maison qui a perdu 30 ou 40% de sa valeur (c'est ce qu'on appelle un "strategic default"), il est à noté qu'il y a débat aux Etats Unis sur la "moralité" d'un tel comportement. Karl Denninger prend le parti de conclure au bien fondé de la manœuvre, au motif que les banques qui s'en plaignent sont les premières à le pratiquer :
http://market-ticker.denninger.net/archives/1749-The-Last-Word-On-Strategic-Defaults.html
Ainsi sur des opérations immobilières majeures sur des buildings entiers de plusieurs milliards de $, les banques ont choisies de rendre l'immeuble plutôt que d'honorer leur emprunt.
Il note aussi que la principale raison qui fait qu'un "strategic default" est envisagé par un ménage, est le fait d'avoir pu acheter sans apport personnel initial. De ce fait, à la première baisse significative du prix du bien, il y a toute les chances que le bien immobilier valent instantanément moins que la valeur du capital à rembourser, ET n'ayant pas engagé un minimum de capital personnel dans l'acquisition du bien, l'emprunteur n'a rien à perdre dans un "strategic default". A méditer lorsqu'on se plaint que les banques françaises réclament un minimum d'apport personnel pour l'achat d'un bien immobilier.
Second point, pour venir en écho à l'optimisme de Vincent sur la capacité des Etats Unis à rebondir, je pointerai l'incroyable prestation de Ron Paul au CPAC ce week end. Le CPAC est la principale conférence des conservateurs américains se tenant chaque année outre atlantique. A cette occasion, Ron Paul a doublement volé la vedette aux stars annoncées (Romney, Palin et consorts), en gagnant haut la main et par surprise le straw poll (sondage) sur le meilleur candidat pour 2012, et en rassemblant le plus grand nombre de spectateurs passionnés pour son intervention à la tribune où il n'a pas hésité à fustiger ce qu'il reste de néocons au sein du parti républicain.
Toute la video de son intervention sur : http://rawstory.com/2010/02/ron-paul-dominates-cpac-largest-loudest-audience/
Rédigé par : ST | lundi 22 février 2010 à 10h45
quand une banques ouvre un pret à une entreprise ou un particulier, ce pret devient un actif pour la banque??? comment est il comptabilisé dans ces comptes??
merci
Rédigé par : mica | lundi 22 février 2010 à 10h58
Qu'avez vous contre les SUV ?
Rédigé par : JM | lundi 22 février 2010 à 18h17
@JM :
Qu'avez vous contre les cuisines en granit ?
Rédigé par : ST | lundi 22 février 2010 à 18h26
@ JM: rien du tout. C'est un cliché à deux balles.
@ Mica: si vous lisez l'anglais, ceci vous explique tout, mais avant la crise: j'apprécie particulièrement le passage où on indique que les banques ont une partie de leurs actifs en fonds de placement surs comme fannie mae et freddie mac...
http://www.fool.com/investing/general/2007/01/05/understanding-a-banks-balance-sheet.aspx
Rédigé par : vincent | lundi 22 février 2010 à 20h29
Au contraire, je ne trouve pas que le couple SUV/Cuisine en granit soit un cliché à deux balles. C'est un symbole pertinent du pic du crédit, et d'un certain état d'esprit très "folie des grandeurs", où tout le monde vit au-dessus de ses moyens, sans se soucier des conséquences.
Si un type s'achète une Audi A8 ou une cuisine Starck avec 3 mois de salaire, tant mieux pour lui !
Le cliché dont on parle, c'est le mec qui se prend un crédit sur des années pour une grosse bagnole, un canapé, un home cinéma de la mort, une cuisine en granit... choses qui ne sont pas des investissements, ne sont pas rentables, et ne sont pas essentielles. C'est du luxe. Le luxe, c'est très bien, quand on peut se le permettre sans sacrifier sa sécurité financière (et accessoirement celle de sa famille).
Rédigé par : Pierre | lundi 22 février 2010 à 20h57
@ Vincent: merci pour le lien, c'est que ce site est vraiment très bien fait, j'avais pas pensé allez voir las bas...
Mais j'ai quelques petites questions quand même:
1) en quoi consiste les sauvetages des banques par les états?
2) y a t'il moyen de trouver un exemple de compte d'une banque en faillite (une qui aurais fais faillite, ou peut être Citigroup qui à été sauvé et comment et pourquoi??)
3) quelle est le critère d'une banque en faillite?
fond propres négatif?? (car il me semble avoir déjà vu en parcouru les comptes de pas mal de société, quelques une ayant des fonds propres négatifs (equity)... donc je sais pas trop...
merci d'avance pour tous ceux qui pourraent me répondre ;-)
Rédigé par : mica | lundi 22 février 2010 à 23h19
Ah enfin ma petite dose de catastrophisme hebdomadaire.
Les américains ont bien de la chance, ils ne sont pas obligés de payer leur crédits. A quand cette opportunité pour les français ?
Rédigé par : JB7756 | lundi 22 février 2010 à 23h49
@ mica : les modalités de sauvetage d'une entreprise sont multiples.
En l'occurence ici, le trésor et la FED ont choisi de racheter aux banques les plus malades des actifs à la valeur douteuse, principalement des produits dérivés (CDO) de "prêts non performants", dont une partie des emprunteurs a cessé de payer les mensualités. Ces actifs ont été rachetés à une valeur sans doute proche de leur nominal (en fait, on ne sait pas - ça n'a pas été fait de façon transparente) mais ne valent sans doute qu'une fraction de ce nominal.
Résultat, les actifs pourris absolument incessibles, sauf à prix massacré, ont été remplacé par du cash dans le compte des banques, qui ont ainsi pu faire face à leurs obligations.
Banques en faillite: comme pour toute société, une banque est en faillite soit lorsqu'elle ne peut plus faire face à ses engagements, soit lorsqu'elle sait de façon certaine qu'à un terme déterminé, elle ne pourra plus faire face à ses engagements.
Comme pour tout entreprise, le problème peut venir de la trésorerie insuffisante à un instant donné pour payer le quotidien, mais dans le cas des banques, semble-t-il, se produit plus souvent le cas où suite à des pertes sur le portefeuille d'actifs, les fonds propres (=le solde de l'actif - les dettes) deviennent négatifs, c'est à dire que la valeur totale des actifs détenus par la banque est inférieure aux dettes de la banque: même si sa trésorerie peut lui permettre de faire illusion quelques temps, la banque se sait alors techniquement insolvable et doit se déclarer en faillite.
dans le cas des entreprises non financières, qui ont des immobilisations (en pourcentage) bien plus importantes que les banques, et surtout des PME, le pbm numéro un n'est pas les FP négatifs mais généralement une trésorerie trop faible qui ne permet pas d'honorer les salaires ou les fournisseurs... Même si les fonds propres sont théoriquement positifs, la société est bel et bien en cessation de paiement.
Rédigé par : vincent | mardi 23 février 2010 à 07h23
merci c'était très clair!!
mais ils doivent rembourser maintenant, comme pour les banques européenne, donc les états ont prêté de l'argent avec un intérêt, c'est donc un emprunt de la banque au final?
Rédigé par : mica | mardi 23 février 2010 à 09h03
@mica :
pour les banques européennes, oui, elles doivent rembourser, puisqu'elles ont été aidées par des prêts, prêts un peu particulier puisqu'elles ont pu les comptabiliser comme des fonds propres alors que ca aurait du au contraire dégrader leur ratio dette / fonds propres. Donc sur le fond leur situation réelle s'est plutôt dégradé du fait des plans de sauvetage. Mais il y a d'autres aspects moins officiels : la BCE leur permet par exemple d'emprunter à taux artificiellement bas pour reprêter directement aux Etats membres qui doivent financer leurs déficits colossaux, empochant incidemment un bénéfice pour avoir simplement servi de maillon à la monétisation des dettes souveraines par la BCE.
Outre Atlantique, dans le cadre du TARP, on y est allé plus franchement, et comme l'a indiqué Vincent, il ne s'agissait pas forcément de prêt mais bel et bien de rachat direct d'actifs toxiques par la FED. Là c'est tout bénef direct, pas de montage compliqué : on a imprimé des $ pour renflouer les caisses des banques.
Dans les deux cas néanmoins ca se rejoint : on monétise des dettes, donc on transfère la charge de certaines dettes à la collectivité via l'inflation (création monétaire).
@jb
Avoir la possibilité de faire défaut sur ses dettes, à savoir la possibilité de sortir d'une situation de surendettement via faillite personnelle (si tant est bien sur que le corollaire soit la liquidation intégrale des biens de l'emprunteur), comme les entreprises ont le droit de le faire d'ailleurs, peut être considéré comme une chose positive, en ce sens que c'est une épée de damocles au dessus de la tête du créancier. Il y réfléchira a deux fois avant de prêter à quelqu'un sans assise financière, à financer l'achat d'un bien sans aucun apport personnel de l'emprunteur etc...
Encore faut il que tout le monde soit sur que la justice et la société ne viendront JAMAIS au secours du créancier si ca se produit : la croyance (fondée en l'occurence) que l'Etat ne laisserait pas tomber les créanciers, à commencer par Freddy Mac et Fanny Mae a empecher ce mécanisme de responsabilisation du créancier de fonctionner.
Rédigé par : ST | mardi 23 février 2010 à 10h05
Tenez, pour la route, une brève qui nous indique que le nombre de banques en difficulté ne cesse d'augmenter :
http://www.marketwatch.com/story/fdic-number-of-troubled-banks-rises-to-702-2010-02-23-100440
Mais le plus "drôle" n'est pas là. Comme l'indique incidemment l'article, le fond d'assurance de la FDIC qui couvre tous les comptes de dépot des américains, et qui a été augmenté à une assurance de 250 000 $ par compte, contre 100 000$ auparavant, en plein coeur de la crise pour éviter tout risque de "panique" ... ce fond est ... en négatif. Oui, l'argent des américains déposé dans les banques est garantie par un fond qui est en déficit. C'est la magie de l'économie de la dette. Nous pouvons tous être rassuré et vaquer à nos occupations.
Une autre facon de le dire, c'est de dire que l'organisme chargé de couvrir le risque de cessation de paiement des banques est ... en cessation de paiement. Business as usual.
Rédigé par : ST | mardi 23 février 2010 à 18h31
@ ST: merci pour les précisions... et le bon coup au moral...
Rédigé par : mica | mardi 23 février 2010 à 19h14