La FED, nouvelle banque centrale, déjà mal inspirée !
En 1913, l'état US met fin au système de monnaie privée qui prévalait jusque là dans de nombreux états de l'union, afin de pouvoir financer par la planche à billets les déficits d'une guerre mondiale qui s'avérait inévitable, et parce que le conflit rendait impossible les transferts d'or de banque à banque. Le lien des monnaies à l'or n'est pas rompu, mais il est distendu. Dès cette époque, les économistes autrichiens, au premier rang desquels Ludwig Von Mises, prédisent que le nouveau système sera instable.
Après guerre, la FED manque de maitrise de son nouveau jouet, et augmente trop vite les émissions de dollars, par une politique de taux faibles, pour "soutenir l'expansion économique" des "roaring twenties". Il en résulte une "bulle d'actifs", laquelle oriente l'argent trop facilement gagné, entre autres, sur les marchés d'actions, en plein boom.
(je reviendrai un jour prochain sur le problème des bulles, et des politiques "bullaires" - Le mystère de la localisation des bulles -- Pourquoi celle ci s'est produite sur les actions, celle là sur les dotcom, les fonds asiatiques, ou l'immobilier ? --- reste pour moi entier...)
L'expansion monétaire provoque des craintes inflationnistes: en 1928, la FED décide d'opérer une vaste contraction monétaire qui aboutira à la disparition sur 3 ans de près du quart de la monnaie en circulation. Un tel rationnement conduit à la pénurie, dont le krach d'octobre 29 ne fut que la première manifestation, mais pas la cause. Il faut d'ailleurs noter que le PER (Price on earnings ratio) de la bourse avant le Jeudi noir était de 19, ce qui est élevé dans l'absolu, mais pas explosif.
A ce stade, vous noterez donc que ce sont des décisions d'état, et un monopole octroyé par l'état à une institution qui n'a de privé que l'apparence, qui ont créé les conditions initiales favorables au déclenchement de la crise.
Une bombe protectionniste
L'événement qui met le feu aux poudres est l'entrée en discussion d'une loi protectionniste, le smoot hawley act, qui fait anticiper aux acteurs de marché une contraction du commerce mondial, provoquant les premières hésitations de la bourse puis la panique boursière que l'on sait. Mais si ce n'était pas cette loi qui avait donné le signal de la fin de partie, ç'aurait été autre chose: les bulles finissent toujours par éclater, peu importe le signal déclencheur.
La loi sera finalement votée en 1930. Elle prévoit une augmentation des droits de douane sur plus de 3000 produits. En représailles, de nombreux pays adoptent des lois similaires. Les volumes d'échange sur les produits considérés sont massacrés. L'agriculture US, ou les constructeurs automobile, perdent tous leurs débouchés à l'export. Les surplus agricoles invendus provoquent une chute des prix des deux tiers, poussant des milliers d'agriculteurs à la faillite. La production automobile est divisée par 4 entre 1929 et 1932.
Un socialiste nommé Herbert Hoover
Rien que la promotion de la loi Smoot-Hawley devrait faire taire le mythe d'un président Hoover "libéral", adepte du laissez faire.
Mais il y eut pire.
Inquiet de la perspective de voir les salaires baisser, puisque les entreprises ne pouvaient payer, Hoover convoqua une conférence entre syndicats et patronats, qui aboutit à limiter autoritairement les baisses de salaire bien en dessous de celles enregistrées par les prix. cela entraîna un renchérissement de la main d'oeuvre qui aboutit à pousser hors du marché du travail des quantités d'employés.
Ce n'est pas fini.
Hoover augmenta considérablement les dépenses de l'état fédéral, de 16 à 21% du PIB, et distribua des "aides" et "soutiens" à qui mieux mieux. Pour ce faire, il multiplia les nouvelles taxes. Même les chèques furent taxés, ce qui eut pour effet de restreindre les opérations financières.
Désolé, je n'en ai pas encore fini avec Hoover, le soi disant héraut du capitalisme triomphant, selon l'imaginaire keynesien. Non content d'avoir endossé la politique de stop and go monétaire de la FED, d'avoir promu des lois protectionnistes, d'avoir augmenté de près d'un tiers le poids de l'état dans l'économie, et d'avoir augmenté de nombreuses taxes, il commit en 1932 l'erreur tragique d'augmenter le taux marginal d'imposition de 24% à 63% !! Plus personne n'était incité à prendre des risques et à créer de nouvelles richesses, à ce compte là.
Résultat, le taux de chômage passa de 3% en 1928 à 25% en 1933... Et encore, nombre de salariés touchaient leurs salaires très en retard. Les collectivités locales, entre autres, ne pouvaient plus payer leurs personnels.
Et Roosevelt dans tout ça ? Un candidat plutôt libéral...
Notons que pendant la campagne présidentielle de 1932, Roosevelt fit campagne contre l'interventionnisme débridé de Hoover, condamnant les dépenses "imprudentes et extravagantes", et accusant le président de mener les USA sur la voie du socialisme ! Et il avait raison.
Roosevelt promit une réduction des impôts, une réduction des dépenses publiques de 25%, un budget fédéral en équilibre, une monnaie "solidement basée sur l'or" pour éviter toute manipulation... Pas du Ron Paul dans le texte, mais pas si loin. Il promit de faire cesser de nombreuses interventions gouvernementales.
Il fut élu par 472 grands électeurs à 59 contre Hoover. Jamais sans doute un président nouvellement élu n'avait suscité autant d'espoirs à son arrivée.
... Un président élu ultra socialiste
Pourtant, dès son intronisation, il décida de faire tout l'inverse de ce qu'il avait promis, provoquant la démission de plusieurs de ses conseillers parmi les plus compétents, qui l'avaient soutenu pendant la campagne.
La liste des actions contre productives de Roosevelt est impressionnante.
Les tranches marginales d'imposition furent augmentées à 90%. Roosevelt essaya même de les porter à 99%, mais se heurta finalement au congrès. Il démonétisa totalement l'or, interdit les transactions en métal, et ordonna que le prix de l'or soit fixé par l'état.
Face à la recrudescence des faillites bancaires, il fit d'abord fermer les banques, ce qui provoqua une panique des épargnants, et 2000 faillites de banques supplémentaires.
Les dépenses budgétaires, que FDR avait promis de réduire de 25%, augmentèrent de 83% entre 1933 et 1936. La dette fédéral augmenta de 73%. Il imposa un salaire minimal qui eut pour effet de sortir plus encore les plus démunis du marché du travail.
Il fit promouvoir le Glass Steagall act, qui interdit aux banques de diversifier leurs activités. Alors que les banques canadiennes, diversifiées et pouvant opérer dans toutes les provinces de la fédération, résistèrent à cette période (rigoureusement aucune ne fit faillite), plusieurs milliers de banques US tombèrent.
L'industrie en coupe réglée...
Il créa une bureaucratie chargée de superviser une mise sous tutelle de l'industrie, par une loi appelée National Industry Recovery Act, votée en juin 1933, analysée de façon extensive par Ohanian et Cole cités plus haut. La bureaucratie en charge du NIRA, la NRA (rien à voir avec l'actuelle National Rifle association), National Recovery Administration, sorte d'organisme de cogestion des entreprises par les gouvernements et les syndicats, sous un régime de prix contrôlés, de salaires minimaux, de codes réglementaires imposés et d'embauches forcées. Le NIRA fut financé par des taxes sur les entreprises contrôlées et entraîna une augmentation des comptes de charges des d'entreprises de 40% !
Alors que l'économie avait montré des signes d'une reprise vigoureuse lors des 6 premiers mois de 1933 (hausse de l'emploi industriel de 25% !!), le NIRA allait lui donner le coup de grâce: dans les 6 mois qui suivirent sa promulgation, la production industrielle chuta de 25%. 2 millions d'entreprises et 22 millions d'employés furent concernées par le NIRA. Lawrence Reed rapporte qu'un tailleur du New Jersey fut mis en prison parce qu'il fabricait des éléments de costumes pour 35 cents alors que le code NRA prévoyait un tarif de 40 cents: et toute l'industrie était gérée de cette façon, et les méthodes des employés du NRA confinaient au Fascisme. En effet, la NRA ne pouvait éviter que se développat un important marché noir. elle eut recours à des méthodes policières musclées, fascisantes, pour faire appliquer les codes du NRA...
Cela paraît difficile à croire tant cela est en décalage avec l'histoire idyllique du New Deal que nous avons retenu de notre passage par l'école, mais toutes les sources historiques fouillées concordent: l'Amérique de Roosevelt était le siège d'un dirigisme de nature très autoritaire. L'analogie avec Mussolini, dont certains proches de Roosevelt étaient ouvertement admirateurs, n'est pas dénuée de fondement. Fort heureusement, la solidité de la constitution imaginée par les pères fondateurs de l'union permit de préserver un minimum de libertés individuelles, qui empêcha toujours un basculement vers un état pré-fascisant.
Naturellement, de nombreux bureaucrates du NRA choisirent de ne pas sévir moyennant corruption. Comme en URSS, de nombreux fonctionnaires préféraient fermer les yeux sur ces marchés parallèles et prélever une dîme au passage: la corruption a ici joué un rôle de soupape de sécurité du système pour l'empêcher de sombrer. Loin de moi l'idée de défendre la corruption, mais dans les régimes les plus sévèrement dirigés, elle est souvent le seul moyen d'acheter un peu de liberté...
Explosion de l'appareil bureaucratique
Toute l'économie fut encadrée par des bureacuraties similaires. Voici une liste non exhaustive des bureaucraties créées sous l'administration Roosevelt:
- AAA - Agricultural Adjustment Administration
- AMA - Agricultural Marketing Administration
- AOA - Administration of Operation Activities
- BCD - Bituminous Coal Division
- BCLB - Bituminous Coal Labor Board
- BEW - Board of Economic Warfare
- BIR-T - Board of Investigations and Research Transportation
- BOB - Bureau of Budget
- BPA - Bonneville Power Administration
- BWC - Board of War Communications
- CAA - Civil Aeronautics Authority
- CCC - Civilian Conservation Corps
- CCC - Commodity Credit Corporation
- CPA - Council of Personnel Administration
- CPRB - Combined Chiefs of Staff
- CEA - Commodity Exchange Administration
- CES - Committee on Economic Security
- CFB - Combined Food Board
- CMB - Combined Munitions Board
- CPRB - Combined Production and Resources Board
- CRMB - Combined Raw Materials Board
- CSAB - Combined Shipping Adjustment Board
- CWA - Civilian Works Administration
- DLC - Disaster Loan Corporation
- DPC - Defense Plant Corporation
- DSC - Defense Supplies Corporation
- EIBW - Export-Import Bank of Washington
- EHFA - Electric Home and Farm Authority
- EPCA - Emergency Price Control Act
- FCA - Farm Credit Authority
- FCC - Federal Communications Commission
- FCIC - Federal Crop Insurance Corporation
- FDIC - Federal Deposit Insurance Corporation
- FERA - Federal Emergency Relief Agency
- FFC - Foreign Funds Control
- FFMC- Federal Farm Mortgage Corporation
- FHA - Federal Housing Administration
- FIC - Federal Insurance Corporation
- FLA - Federal Loan Agency
- FNMA - Federal National Mortgage Corporation (Fannie Mae)
- FPA - Food Production Administration
- FPHA - Federal Public Housing Authority
- FRC - Facilities Review Committee
- FREB - Federal Real Estate Board
- FSA - Federal Securities Administration
- FSA - Farm Security Agency
- FSCC - Federal Surplus Commodity Corporation
- FTC- Federal Trade Commission
- FWA - Federal Works Agency
- HOLC - Home Owners Loan Corporation
- LOPM - Liaison Office for Personnel Management
- MLB - Maritime Labor Board
- MRC - Metal Reserve Company
- NBCC- National Bituminous Coal Commission
- NHA - National Housing Authority
- NHPC - National Historical Publications Commission
- NIC - National Insurance Board
- NLB - National Labor Board
- NLRB - National Labor Relations Board
- NMB - National Mediation Board
- NPPC - National Power Policy Committee
- NRA - National Recovery Administration
- NRAB- National Railroad Adjustment Board
- NRB - National Resources Board
- NRC- National resources Committe
- NRPB - National Resources Planning Board
- NWLB - National War Labor Board
- NYA - National Youth Administration
- OBCCC - Office of Bituminous Coal Consumers Council
- OC - Office of Censorship
- OCD - Office of Civilian Defense
- OCIAA - Office of Coordinator of Inter-American Affairs
- ODHWS - Office of Defense and Health and Welfare Services
- ODT - Office of Defense Transportation
- OEM - Office of Emergency Management
- OES - Office of Economic Stabilization
- OLLA - Office of Lend-Lease Administration
- OPA - Office of Price Administration
- OPCW - Office of Petroleum Coordinator for War
- OSRD - Office of Scientific Research and Development
- OWI - Office of War Information
- PAW - Petroleum Administration for War
- PCD - Petroleum Conservation Division
- PIWC - Petroleum Industry War Council
- PRA - Public Roads Administration
- PRP - Production Requirements Plan
- PRRA - Puerto Rico Reconstruction Administration
- PWA - Public Works Association
- PWRCB - President's War Relief Control Board
- RA - Resettlement Administration
- RACC - Regional Agricultural Credit Corporation
- REA - Rural Electrification Administration
- RFC- Reconstruction Finance Corporation
- RRB - Railroad Retirement Board
- RRC - Rubber Reserve Company
- SA - Sugar Agency
- SEC - Securities and Exchange Commission
- SCS - Soil Conservation Service
- SMA - Surplus Marketing Association
- SSB - Social Security Board
- SSS - Selective Service Board
- SWPC - Small War Plants Corporation
- TNEC - Temporary National Economic Committee
- TVA - Tennessee Valley Authority
- UNRRA - United Nations Relief & Rehabilitation Administration
- USES - United States Employment Service
- USHA - United States Housing Authority
- USMC - United States Maritime Commission
- WDC - War Damage Corporation
- WEPL - War Emergency Pipe Lines, Inc.
- WMC - War Manpower Commission
- WPA - Works Progress Administration
- WPB - War Production Board
- WRA - War Relocation Authority
- WSA - War Shipping Administration
Ah, les emplois aidés...
Inutile de dire que la productivité de ces administrations fut pus que douteuse. L'un des volets les plus importants de la politique de FDR fut la politique des emplois aidés pour les grands travaux.
Deux administrations, la CWA puis la WPA, se succédèrent pour créer des emplois publics destinés à réaliser des ponts, des routes, des immeubles, mais aussi parfois à des tâches essentielles comme des troupes de théâtre, et autres... Si la mythologie populaire affirme que cette politque a permis de relancer l'économie US, il n'en est rien. Pour quelques réalisations spectaculaires (barrages, ponts, etc...) qui servirent d'exemple, mille autres projets, en fait, plus de 200 000, soit n'aboutirent jamais, ne furent pas achevés, ne servirent à rien (bridges to nowhere), ou furent l'occasion pour les bureaucrates en charge de leur achèvement, de toucher de juteuses contreparties occultes.
L'économie commença à respirer quand la cour suprême, dont FDR avait tenté de réduire les pouvoirs, déclara illégale la NRA et le NIRA, ainsi que son équivalent dans l'agriculture, l'AAA, en 1936. La cour a joué un rôle important dans cette période, constituant souvent le dernier rempart contre les atteintes répétées de l'administration Roosevelt contre les libertés individuelles.
Mais les hausses d'impôt sur les sociétés, les nouvelles instances de représentation syndicales, et quelques autres créations de l'administration Roosevelt, eurent tôt fait de stopper l'embellie toute relative. Le chômage, malgré les mesures de travail artificiellement fourni par l'état, resta supérieur à 15%, pour remonter à 18% à la veille de la guerre.
Je passe sur les détails de nombreuses autres politiques socialistes aux relents fascisants mises en place par FDR. Les relations entre syndicats, employeurs et bureaucraties tournaient souvent à la confrontation, parfois dure. Un employeur qui résistait au diktat conjoint de l'état et des syndicats risquait parfois plus que son entreprise...
Le secrétaire au trésor de FDR, un certain Henry Morgenthau, écrivit dans son journal privé que "non seulement ce gouvernement n'avait tenu aucune de ses promesses, qu'il y avait autant de chômage et plus de pauvreté qu'à leur arrivée, et que la seule évolution notable des années FDR fut celle de la dette publique qui avait explosé".
Ah, et FDR a légué à l'Amérique Fannie Mae. Le monde continue de payer, d'une certaine manière, les tragiques erreurs de FDR.
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